Bien. Maintenant, revenons à nos moutons. M. Nakao s'est dit qu'il serait peut-être intéressant de glisser une variable dans cette équation, à savoir l'altruisme. C'est-à-dire si l'on considérait que les deux prisonniers ne se souciaient pas uniquement de leur petite personne, mais aussi du sort de l'autre.
Le chercheur a par conséquent concocté un modèle de calcul économétrique visant à simuler ce qui se passerait dans le dilemme du prisonnier si l'on introduisait la variable de l'altruisme. Ce qui lui a permis de faire deux belles trouvailles :
> Du pour. L'altruisme modère la tentation de l'emprunteur de faire défaut. Pourquoi? Parce que l'emprunteur, dès lors, ne pense plus en fonction de lui-même, mais aussi en fonction de l'autre. Du coup, il veille à rembourser ses dettes, afin de ne pas mettre son ami en difficulté.
> Du contre. L'altruisme accroît la tentation de l'emprunteur de faire défaut. Pourquoi? Parce que ce qui l'incite à ne pas rembourser ses dettes, c'est qu'il pense que le risque d'être puni pour cela va en diminuant à mesure qu'il connaît le prêteur : «Mon ami ne me sanctionnera jamais pour ça. Car il sait que cela reviendrait à me maintenir la tête sous l'eau. Et c'est quelque chose qu'il ne me fera jamais, même si je ne suis pas correct avec lui», pense-t-il alors.
Autrement dit, à partir du moment où l'altruisme entre en ligne de compte, celui-ci se traduit par l'apparition de deux forces contraires en matière de coopération. D'une part, l'altruisme pousse à la coopération, parce que chacun a le souci de l'autre. D'autre part, il nuit à la coopération, parce que chacun sait que l'autre rechignera à le sanctionner pour un comportement inadéquat.
La question saute aux yeux : l'une des deux forces l'emporte-t-elle sur l'autre? M. Nakao se l'est, bien entendu, posée. Voici ce qu'il a trouvé :