«Réduflation» de la main-d’œuvre
Cette meilleure compréhension des acquis des membres de son équipe permet aussi de braquer les projecteurs là où l’organisation accuse du retard ou manque carrément de compétence.
En effet, en 2022, les entreprises du Fortune 500 clientes d’Explorance avaient en moyenne besoin de sept ans pour retrouver un niveau d’expertise similaire à celui de 2019 d’après ses calculs. Ce phénomène est non moins vrai au sein des PME du Québec, rapporte Samer Saab, PDG de la société montréalaise spécialiste du développement de logiciels pour améliorer l’expérience des employés.
Selon ce qu’observe Martin Lafrance, directeur du conseil des ressources humaines chez Raymond Chabot Grant Thornton, faute du candidat idéal, nombre d’entreprises embauchent des travailleurs qui n’ont ni les compétences ni même l’expérience autrefois exigées pour camper un rôle.
« Avant, on pouvait se permettre de choisir la crème de la crème, mais là, avec la pénurie et un bassin de main-d’œuvre plus restreint, on engage des gens beaucoup moins expérimentés, ce qui nous oblige à adapter nos programmes de formation », confirme Annie Bélanger.
Annie Bélanger, directrice pour le développement des compétences à Hydro-Québec (Photo: Martin Flamand)
Les départs à la retraite et la mine d’or de connaissances que les travailleurs emportent avec eux expliquent aussi ce phénomène, d’après Marie-Pier Bédard, vice-présidente exécutive à Randstad Canada.
Les entreprises qui surveillent de près les aptitudes des employés évitent que la transition climatique et la démocratisation de l’IA ne rendent désuète une partie de leur équipe.
En 2018 déjà, Deloitte soulignait que « la demi-vie d’une compétence professionnelle — soit la période au bout de laquelle 50 % de son impact ou de sa pertinence disparaît — est aujourd’hui de moins de cinq ans, alors qu’elle se situait aux alentours de 30 ans dans les années 1980. »
« Le défi est double : maintenir les compétences nécessaires et soutenir l’émergence de nouvelles, souligne Annie Bélanger. En connaissant celles de ma main-d’œuvre, je m’assure de la rattraper, de la former et de l’amener [dans une autre division] où j’aurai besoin d’elle. »