L’apport de la recherche
Ainsi, confirment les deux professeurs, les relations de travail sont demeurées à l’avant-plan jusqu’au milieu des années 1970. Or, en parallèle, «il y a eu des développements fondamentaux en matière de ressources humaines, qui ne se sont pas immédiatement répercutés dans les environnements de travail», rappelle Alain Gosselin.
Ce n’est que dans les années 1980 qu’ils ont commencé à s’y refléter, précise Tania Saba.
L’adoption de nouvelles lois a forcé les employeurs à s’intéresser davantage à la santé et à la sécurité, à démontrer que l’entreprise ne faisait pas de discrimination ou qu’elle respectait l’équité salariale.
«Il fallait alors implanter des politiques, des programmes, faire la formation des gestionnaires, documenter, faire de la reddition de compte… Les spécialistes [des ressources humaines] ont commencé à gagner en influence», indique la fondatrice et titulaire de la Chaire BMO en diversité et gouvernance.
Ç’a donné le coup d’envoi à la gestion stratégique des ressources humaines comme on la connaît aujourd’hui.
L’arrivée des stratégies
Jusqu’alors, chaque facette comprise dans la Division des ressources humaines évoluait en parallèle. «On faisait bien les choses dans chacun des silos, mais ça ne garantissait pas quelque chose d’harmonieux et de logique pour l’employé. On formait pour le travail d’équipe, mais on payait au mérite», illustre Alain Gosselin.
Les crises économiques qui se sont succédé «ont créé beaucoup de pression sur la rationalisation», nourrissant un besoin grandissant pour une gestion plus stratégique des ressources humaines.
Ce n’est toutefois qu’à partir du tournant des années 2000, voire 2010, que cette division a pu rapprocher sa chaise des tables de décision de leur organisation lors des discussions stratégiques.
«Elles [les entreprises] ont compris que ça ne leur donnait rien d’avoir des plans de croissance si elles n’en avaient pas élaboré un autre qui leur permet d’avoir du personnel de qualité et en quantité suffisante», résume le professeur émérite.
Olivier Schmouker a surtout commencé à observer un changement de ton à partir de la crise économique de 20072008. «Un des premiers articles du magazine Premium qui a fait un tollé, c’est sur une étude d’Harvard qui expliquait comment virer 5%, 10% et 15% de tes employés par étapes, sans trop de casse», rapporte-t-il.
De 2009 à 2014, cette publication diffusée aux deux mois a été un jalon de la couverture de la gestion des ressources humaines par Les Affaires, d’après lui.
«On a réalisé qu’il y avait une soif d’information sur le management. C’était une petite révolution pour le journal, qui était alors convaincu que ce qui importait aux lecteurs, c’était la vie des entrepreneurs et les cotes de la Bourse.»
C’est ainsi que des papiers sur le quotidien au boulot, l’efficacité et le bonheur au travail se sont taillé une place dans ses pages, des sujets qui en ont fait sourciller plus d’un au début, reconnaît le journaliste.
«On me disait que c’était de la bullshit, se souvient-il. J’ai compris qu’il y avait de l’éducation à faire, et le seul moyen d’y parvenir, c’était de me baser sur des études scientifiques.»