Comment ça? Grâce à un curieux phénomène qu'ils ont noté lors des calculs effectués avec leur modèle économétrique : dans le cas de figure où les deux candidats offrent un cadeau au dirigeant, si le plus beau cadeau est trois fois supérieur, ou plus, à l'autre, alors son impact va… en décroissant! C'est-à-dire que si le cadeau est «trop gros», il gêne celui qui le reçoit, au point de devenir contre-productif. Dès lors, la réciprocité ne fonctionne plus, car elle nécessiterait un geste en retour démesuré aux yeux du dirigeant : les deux candidats se retrouvent à égalité, avec les mêmes chances d'emporter le contrat.
D'où ces quelques recommandations pour atténuer l'impact des discrètes tentatives de corruption :
> Si vous recevez un cadeau intéressé, n'en profitez pas. Jamais. Déclarez, par exemple, à l'ensemble de vos collègues que vous avez reçu un beau stylo ou un ticket pour un match de hockey, et invitez tout le monde à participer à un tirage au sort pour le gagner. Ou mieux, retournez-le poliment.
> Si vous refusez plusieurs cadeaux à la fois, agissez de la même manière. Et faites-le diplomatiquement savoir à qui de droit.
> Ne vous cachez plus derrière une règle tacite, du genre «Si le cadeau vaut moins de 200 dollars, on peut l'accepter, sinon, on doit le refuser». Car c'est une règle hypocrite, qui "arrange" tout le monde. En effet, l'étude montre sans l'ombre d'un doute que plus le cadeau est modeste, plus il a d'impact. Et maintenant que vous le savez, il ne vous est plus possible de faire semblant de rien.
Voilà. Vous êtes désormais armés pour faire face aux corrupteurs qui rôdent peut-être autour de vous en ce moment-même. Ce qui devrait, je l'espère, vous éviter bien des ennuis, comme celui de passer, un jour, en direct sur RDI…
En passant, l'écrivain français Charles Péguy a dit dans L'Argent : «Le monde est plein d'honnêtes gens. On les reconnaît à ce qu'ils font les mauvais coups avec plus de maladresse».