Autrement dit, la crise financière avait refroidi d'un coup l'ardeur des clients de cette banque, à tel point qu'ils se sont montrés par la suite «démesurément prudents». Et c'est justement cette prudence excessive qui a mis la puce à l'oreille des trois chercheurs : un facteur psychologique avait dû entrer en ligne de compte et fausser le jugement des personnes concernées.
Mme Sapienza et MM. Guiso et Zingales ont alors demandé à 249 étudiants d'une université américaine de répondre à un questionnaire d'une quarantaine d'interrogations. L'objectif était d'évaluer l'aversion au risque de chacun, une fois après avoir été mis dans une condition particulière :
> Certains ont auparavant dû visionner un extrait de cinq minutes du film d'horreur Hostel d'Eli Roth, dans lequel un jeune homme est sauvagement torturé dans un sous-sol.
> Les autres ont dû regarder un extrait d'un autre film n'ayant, lui, aucune charge émotionnelle notable.
Résultat? Une fois de plus, ceux qui avaient été effrayés se sont montrés par la suite démesurément réticents à prendre des risques. Hormis – cela mérite d'être souligné – ceux qui étaient habitués à voir des films d'horreur.
«La peur accroît donc notre aversion au risque. Et surtout, elle laisse des traces durables : nous avons ainsi vérifié qu'après avoir connu une grande frayeur (par exemple, une chute brutale des cours boursiers), les courtiers ont en général tendance à vendre plutôt qu'à acheter, non pas parce que c'est ce qu'il faut logiquement faire, mais juste parce qu'ils cèdent à la peur, n'ayant plus l'impression de contrôler la situation autant que d'habitude», disent les trois professeurs de finance dans leur étude.