[Photo : Bloomberg]
C’est un secret de polichinelle dans le milieu des technos au Québec. Certaines entreprises, dont la mort clinique a été diagnostiquée par le marché, demeurent étrangement en vie, parfois durant des années. Grâce aux subventions, aux bourses et aux crédits d’impôt pour la recherche et le développement, une entreprise dont les ventes sont inférieures à sa masse salariale peut en effet vivoter des années au Québec.
On appelle ces organisations des entreprises zombies, parce qu’elles sont entre la vie et la mort. Qui plus est, elles sont aussi délétères pour la carrière de leurs employés. J’ai un ami qui, après avoir obtenu son diplôme, a été embauché par une entreprise zombie, qui existait depuis plusieurs années. Au début, mon ami était enthousiaste de se voir confier d’importantes responsabilités au sein d’une entreprise techno, dont le potentiel, du moins sur papier, semblait substantiel.
Il a toutefois vite déchanté en constatant qu’il travaillait pour une entreprise qui ne connaitrait probablement jamais aucune croissance, tant sa stratégie était dictée par les incitatifs fiscaux. Aussi, plutôt que d’investir en marketing, l’entreprise n’en finissait plus d’ajouter de nouvelles fonctionnalités à son produit, sachant qu’une grande proportion du salaire des ingénieurs qui y travaillaient serait remboursée sous forme de crédits d’impôt.
Mon ami s’est aujourd’hui joint à une start-up bien en vue et bien capitalisée à Montréal et sa carrière semble sauve. Cependant, le cas de l’entreprise pour laquelle il travaillait est trop commun au Québec pour le considérer marginal.
D'ailleurs, un entrepreneur en série m’a déjà parlé de l’effet pervers des généreux crédits d’impôt au Québec qui, selon lui, conduisait les start-ups québécoises à investir trop dans le développement et pas assez dans la commercialisation. Toutefois, il ne souhaitait pas prendre position publiquement. Et pour cause. Si ces crédits sont utilisés par des entreprises zombies, ils constituent aussi un avantage compétitif pour les fleurons de l’écosystème québécois de start-ups, qui s’en prévalent sans pour autant sacrifier leur stratégie de croissance à l’autel des incitatifs fiscaux.
Les entreprises zombies, du reste, ne sont pas uniques au Québec. On en trouve aussi partout où on trouve des start-ups financées par des investisseurs en capital de risque. Aux États-Unis, par exemple, les start-ups zombies sont essentiellement celles à qui il reste des fonds, mais dont le projet entrepreneurial a échoué. Ces start-ups peuvent alors fermer leurs portes, lancer un tout nouveau produit (on dit faire un pivot dans le jargon) ou encore devenir des zombies.
La suite : Les zombies de FounderFuel