Élections européennes: les implications économiques pourraient être considérables

Publié le 11/06/2024 à 14:16

Élections européennes: les implications économiques pourraient être considérables

Publié le 11/06/2024 à 14:16

Trump en ligne de mire

La forte progression de la droite dure en Europe est susceptible de se répercuter même aux États-Unis, où l’on peut s’attendre à ce qu’elle encourage les forces politiques apparentées fidèles à l’ancien président Donald J. Trump, qui cherche à revenir au pouvoir.

Avec l’éventualité de l’arrivée de Trump et des conflits géopolitiques «aux portes» de l’Europe, la question se pose de savoir comment l’Europe pourra répondre à ces menaces, compte tenu de la potentielle «faiblesse» politique de la France et de l’Allemagne.

Rappelons ici qu’aujourd’hui, hormis le premier ministre hongrois Viktor Orban, qui a rencontré le 8 mars son «bon ami» Trump dans sa résidence de Mar-a-Lago, et la présidente du Conseil italien Giorgia Meloni, dont le parti, Fratelli d’Italia, entretient des relations amicales avec l’équipe du candidat républicain, aucun dirigeant européen ne se réjouit de le voir reprendre les rênes du pays.

L’arrivée de plusieurs personnes de la «droite dure» au parlement européen pourrait cependant faire «évoluer» les relations avec les États-Unis.

 

Conséquences politiques et économiques

Les plus grands perdants de l’élection semblent être les Verts, qui ont vu leur soutien s’effondrer d’un quart par rapport à ce qu’il était il y a cinq ans. Néanmoins, les Verts, avec leurs 53 sièges, pourraient jouer un rôle important dans le renforcement des majorités centristes en tant qu’alternative aux partis d’extrême droite.

• Incertitude du marché : Le changement de gouvernance potentiel en Europe peut entraîner une volatilité des marchés, les investisseurs étant incertains de l’avenir du paysage politique et de ses politiques.

• Stagnation des politiques : Avec l’évolution des forces en présence en Europe, toute réforme économique ou législation en cours peut être interrompue, ce qui risque de retarder d’importantes décisions économiques.

• Confiance des investisseurs : En fonction des alliances qui devraient prendre place (ou non) en Europe, la confiance des investisseurs pourrait se détériorer (ou s’améliorer) en cas d’instabilité politique.

• Taux de change : L’instabilité politique peut affecter la valeur de la monnaie, entraînant des fluctuations des taux de change, ce qui joue sur le commerce international et les investissements. On a constaté une nette détérioration de l’EUR hier matin.

• Réformes à long terme : La nouvelle gouvernance en Europe pourrait apporter des changements aux politiques économiques, ce qui pourrait avoir des conséquences à long terme sur la croissance, l’emploi et les dépenses publiques.

Au niveau politique, le premier test (ou la première réponse) en Europe pour la majorité centriste affaiblie sera l’approbation du nouveau président de la Commission européenne, prévue en juillet.

Ursula von der Leyen, qui a été approuvée pour son poste il y a cinq ans par une marge étroite de seulement neuf voix et qui est susceptible d’être nommée à nouveau, devra faire un travail de lobbying intensif pour assurer sa nomination.

Au niveau économique, les élections européennes et nationales de 2024 pourraient entraîner une fragmentation du consensus européen traditionnel sur le commerce, ce qui pourrait se traduire par des changements de politique en faveur des partisans de la souveraineté nationale et du protectionnisme.

Cela pourrait conduire à une augmentation des barrières commerciales et des contrôles réglementaires, en particulier sur le commerce intra-UE et les produits ne répondant pas aux normes européennes.

Les débats autour du Green Deal de l’UE et de sa mise en œuvre au niveau local dans des secteurs tels que l’industrie, l’infrastructure, la mobilité et l’utilisation de l’énergie devraient dominer le débat postélectoral. Rappelons que les cinq prochaines années seront déterminantes pour la réalisation des objectifs de l’Europe en matière de changement climatique à l’horizon 2030.

L’UE a passé les cinq dernières années à adopter un paquet de lois sur les énergies propres et la réduction des émissions de CO2 afin d’atteindre ses objectifs pour 2030, et il sera difficile d’annuler ces politiques.

Mais un Parlement européen plus sceptique à l’égard du climat pourrait tenter d’ajouter des failles pour affaiblir ces lois, étant donné que nombre d’entre elles doivent être réexaminées dans les prochaines années — y compris l’élimination progressive de la vente de nouvelles voitures à moteur à combustion en 2035 comme le rappelle l’agence Reuters. Le Parlement européen négociera également avec les États membres de l’UE un nouvel objectif juridiquement contraignant de réduction des émissions d’ici à 2040.

Les sujets controversés, tels que la rénovation des bâtiments existants pour en améliorer l’efficacité énergétique, soulignent aussi l’importance de ces questions au niveau local.

L’Union Européenne pourrait ainsi perdre du terrain face à des concurrents mondiaux comme les ÉtatsUnis et la Chine, en particulier dans des secteurs en plein essor comme celui des voitures électriques.

Enfin, signalons que la politique étrangère et de défense est avant tout du ressort des États membres de l’UE, et non du Parlement européen. Le résultat des élections ne devrait donc pas avoir de conséquences immédiates sur le soutien de l’UE à l’Ukraine ou sur les questions militaires.

Ceci n’est évidemment que de la théorie. Cependant, les secteurs précités pourraient connaître une forte volatilité avant que les éléments ne soient plus «clairs».

 

Synthèse

Tout le monde s’attendait à une progression des partis populistes en Europe, mais personne ne pensait que cette «déferlante» aurait des conséquences aussi importantes forçant par exemple le président Macron à dissoudre l’Assemblée nationale. Ces élections ne doivent pas être minimisées et auront des effets politiques et économiques encore inconnus.

 

 Ce texte est tiré de l’infolettre quotidienne de John Plassard, gracieuseté de Mirabaud

 

** Veuillez prendre note que les visuels de notre expert sont présentés en anglais à titre informatif et ne peuvent être traduits par notre équipe. Merci de votre compréhension.

 

À propos de ce blogue

John Plassard a commencé sa carrière en 1998 chez Exane BNP Paribas en tant que co-responsable des actions. Il a ensuite pris la direction du courtier français Louis Capital Market à Genève. John Plassard est actuellement directeur chez Mirabaud Banque depuis 2012. Expert en macroéconomie avec plus de 25 ans d’expérience sur les marchés financiers, John Plassard est l’auteur du «Morning Insight» de Mirabaud et un contributeur reconnu des médias internationaux (CNBC, «Bloomberg», «Wall Street Journal», «Financial Times», etc.). Il anime chaque jour une émission économique sur la chaîne de télévision française BFM. Spécialiste de l’économie américaine, où il a passé de nombreuses années, il a publié plusieurs ouvrages.

John Plassard

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