Fusion nucléaire: l'avancée majeure

Publié le 03/06/2024 à 12:10

Fusion nucléaire: l'avancée majeure

Publié le 03/06/2024 à 12:10

Des techniciens travaillent sur le champ biologique pendant le lancement de l'étape d'assemblage de la machine de fusion nucléaire «Tokamak» du réacteur thermonucléaire expérimental international (ITER). (Photo: Getty Images)

EXPERT INVITÉ. C’est le rêve fou de plusieurs scientifiques et doux rêveurs depuis des dizaines voire des centaines d’années : créer de l’énergie grâce à la fusion nucléaire. Si c’est une thématique que nous avons abordée il y a quelques années de cela, une percée majeure vient de se produire. Que faut-il en penser et quelles sont les occasions d’investissement? Synthèse et analyse.

 

 

Les faits

Dans le cas du réacteur de fusion français WEST, comme le rapporte National Geographic, les scientifiques ont réussi à maintenir le plasma à une température stupéfiante de 100 millions de degrés Fahrenheit pendant six minutes, dépassant de loin la température du cœur du Soleil, qui est d’environ 27 millions de degrés Fahrenheit.

L’expérience (réussie) permet enfin d’atteindre l’objectif d’allumage promis lors du lancement de la construction de la National Ignition Facility en 1997. Cependant, lorsque les opérations ont commencé en 2009, l’installation n’a pratiquement pas produit de fusion, une déception embarrassante après un investissement de 3,5 milliards de dollars du gouvernement fédéral.

Le National Geographic souligne qu’un kilogramme de combustible de fusion — principalement un mélange d’isotopes d’hydrogène, le deutérium et le tritium — peut produire une énergie quatorze millions de fois supérieure à celle d’un kilogramme de combustible fossile, tout en évitant les émissions de gaz à effet de serre. Ces chiffres impressionnants soulignent le potentiel de la fusion nucléaire en tant que source d’énergie inépuisable et propre.

La réaction de fusion en laboratoire a de fait produit plus d’énergie qu’il n’en a fallu pour la déclencher.

 

 

Qu’est-ce que la fusion nucléaire?

La fusion nucléaire émule les processus naturels au cœur du Soleil, où les atomes d’hydrogène fusionnent pour former de l’hélium, libérant ainsi une énergie énorme qui dépasse largement celle de la fission nucléaire.

Luis Delgado-Aparicio, qui dirige les projets avancés au PPPL, décrit la fusion nucléaire comme une sorte de «soleil artificiel sur Terre». Il s’agit d’un défi de taille, car il faut atteindre des températures supérieures à celles du cœur du soleil tout en réduisant les niveaux de pression pour faciliter la fusion.

Un autre obstacle important est le maintien de la réaction de fusion nucléaire, qui est susceptible de s’éteindre rapidement, en particulier en cas de contamination du combustible. En outre, pour que la fusion soit viable, elle doit produire plus d’énergie que la quantité utilisée pour chauffer le plasma à des températures aussi extrêmes. Les dernières expériences ont permis de produire 15% d’énergie en plus, même si la production nette d’énergie n’est pas au rendez-vous.

Les tokamaks, caractérisés par leur forme de beignet avec un trou central, sont un type spécifique de réacteur de fusion dans lequel le plasma est contenu par un champ magnétique puissant. Le choix du matériau des parois du réacteur est un élément essentiel de la conception.

À l’origine, le réacteur WEST utilisait du carbone pour ses parois en raison de sa facilité de manipulation, mais il absorbait le tritium du mélange combustible. En 2012, il a été remplacé par du tungstène, qui, malgré les problèmes qu’il pose, tels que la fusion et la contamination par le plasma à haute température, sera également utilisé dans le réacteur ITER, le plus important projet de réacteur expérimental de fusion dans le sud de la France.

Les scientifiques du PPPL ont également mis au point un outil de diagnostic amélioré pour contrôler avec précision la température du plasma et suivre les mouvements du tungstène dans le réacteur. Ces informations serviront aux travaux en cours sur le réacteur ITER.

 

Quel est le but ultime?

La fusion serait essentiellement une source d’énergie sans émissions, et elle contribuerait à réduire le besoin de centrales électriques brûlant du charbon et du gaz naturel, qui rejettent chaque année dans l’atmosphère des milliards de tonnes de dioxyde de carbone qui réchauffe la planète.

Mais il faudra un certain temps avant que la fusion ne devienne disponible à une échelle pratique et généralisée, si jamais elle le devient.

On parle ici de décennies.

Jusqu’à présent, les efforts de fusion ont principalement utilisé des réacteurs en forme de beignets appelés tokamaks. Dans ces réacteurs, l’hydrogène gazeux est chauffé à des températures suffisamment élevées pour que les électrons soient arrachés aux noyaux d’hydrogène, créant ainsi ce que l’on appelle un plasma — des nuages de noyaux chargés positivement et d’électrons chargés négativement.

Les champs magnétiques emprisonnent le plasma dans le beignet, et les noyaux fusionnent, libérant de l’énergie sous forme de neutrons qui s’envolent vers l’extérieur.

Suivant: Qu'est-ce qui doit être améliorer encore? 

À propos de ce blogue

John Plassard a commencé sa carrière en 1998 chez Exane BNP Paribas en tant que co-responsable des actions. Il a ensuite pris la direction du courtier français Louis Capital Market à Genève. John Plassard est actuellement directeur chez Mirabaud Banque depuis 2012. Expert en macroéconomie avec plus de 25 ans d’expérience sur les marchés financiers, John Plassard est l’auteur du «Morning Insight» de Mirabaud et un contributeur reconnu des médias internationaux (CNBC, «Bloomberg», «Wall Street Journal», «Financial Times», etc.). Il anime chaque jour une émission économique sur la chaîne de télévision française BFM. Spécialiste de l’économie américaine, où il a passé de nombreuses années, il a publié plusieurs ouvrages.

John Plassard

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