Mais le marché ne semble pas vouloir
La question est cependant de savoir si le marché et les actionnaires souhaitent voir SNC-Lavalin prendre de l'expansion.
Il se trouve un courant qui aimerait davantage la voir se concentrer sur son redressement et tout simplement ensuite retourner plus d'argent à ses actionnaires.
La discussion a pris de l'ampleur, il y a quelques jours, avec la vente de sa participation dans Altalink, l'important distributeur d'électricité albertain. Si la transaction est approuvée par les autorités réglementaires, SNC recevra pour l'équivalent de 19,50$ par action en argent (après impôt) à la fin de l'année.
"La grande question est: que fera SNC avec cet argent? Si l'entreprise l'utilise pour une acquisition dans le secteur de l'ingénierie, nous voyons peu de création de valeur possible pour le 19,50$ reçu en argent et plus de risque que si cet argent était réinvesti dans une utilité publique ou tout simplement retourné en dividende", écrit l'analyste Paul Lechem, de CIBC Marchés mondiaux.
Illustration de la crainte, dans le courant de l'été dernier, la rumeur avait couru que SNC s'intéressait à Kentz Group, une société londonienne, spécialisée dans l'ingénierie et la construction pétrolière. Le titre avait immédiatement cédé 4%.
La difficulté est que les activités d'ingénierie de SNC se négocient à des multiples nettement plus faibles que ceux des acquisitions potentiellement en mire. Il y a un peu de flottement parce que personne n'accorde la même valeur aux concessions, mais disons que l'on s'entend généralement pour dire que les activités d'ingénierie se négocient à 6,5 fois le BAIIA, alors que les cibles d'acquisition sont souvent à 8 ou 10 fois le BAIIA. Si vous achetez quelque chose à 10 fois le BAIIA et que le marché décide ensuite de continuer d'appliquer au bénéfice acheté le multiple de 6,5 fois qu'il vous appliquait, vous détruisez de la valeur. Il aurait sans doute mieux valu ne pas faire la transaction et retourner l'argent aux actionnaires.
En conférence de presse, monsieur Card a indiqué qu'il voulait qu'une éventuelle acquisition soit accréditive au bénéfice de SNC. Ce qui nous a amené à lui demander comment la chose pourrait être possible, étant donné la situation de multiples. Il a fait allusion à de possibles montages financiers, sans être très spécifique.
Que fera SNC?
Une des solutions préconisée par l'analyste Maxim Sytchev, de Dundee, serait que la société montréalaise commence par procéder à un important rachat d'actions. Ce qui devrait alors faire remonter la valeur de ses actions, et conséquemment la force de ses multiples.
Il est possible que ce soit ce que monsieur Card ait à l'esprit.
Si une occasion se présente, l'entreprise ne devrait de toute façon, à notre avis, pas trop longuement s'interroger sur la situation. Son plan de match est à long terme. Et si SNC-Lavalin réussit "à nettement plus que doubler son bénéfice" sur cinq ans, les multiples se réajusteront par eux-mêmes dans le temps. Ce qui initialement n'était pas accréditif, le deviendra alors. Tout est question de confiance.
Beaucoup d'actionnaires critiqueront assurément sur le coup.
Mais il faut parfois savoir dompter le marché.
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