Le consensus qui semblait prévaloir lors du dévoilement du rapport D'Amours commence à s'effriter passablement.
On a pu voir la semaine dernière le Syndicat canadien de la fonction publique (SCFP) ouvrir le feu sur les recommandations du comité d'experts. Il a notamment dénoncé le droit de l'employeur de décréter la fin de l'indexation des régimes de retraite si on ne s'entendait pas sur une façon de renflouer les déficits actuariels après trois ans. Il a aussi décrié la nouvelle méthode de calcul de ces déficits (capitalisation améliorée), qui a pour effet de faire fondre ceux des entreprises privées, mais de significativement faire gonfler ceux des villes et universités.
La sortie du SCFP n'est pas réellement une surprise, et d'autres syndicats s'amèneront probablement avec le même discours dans les prochains jours.
Grâce à une nette embellie sur les marchés financiers, les déficits actuariels des régimes semblent avoir significativement fondu depuis le dépôt du rapport D'Amours. Le degré médian de solvabilité des régimes de retraite sous la supervision de la Régie des rentes était à 74% au 31 décembre 2011 (date à laquelle renvoie le rapport). La firme Aon Hewitt indiquait la semaine dernière aux élus qu'au 31 juillet 2013, il se situait maintenant à 84%.
De quoi rendre les syndicats moins portés aux concessions.
SUIVRE SUR TWITTER: F_POULIOT
La surprise est cependant venue de certaines oppositions senties à l'instauration de la rente de longévité.
Le rapport prévoit que les salariés et les employeurs contribueront (1,6% du salaire admissible chacun) à un fonds qui, lorsque le salarié atteindra l'âge de 75 ans, commencera à lui verser une rente.
Le salarié gagnant plus de 51 000$ cotisera 843,15$ par année (même montant pour l'employeur) et recevra en retour une rente de 10 220$ par année à sa retraite.
Le respecté Claude Castonguay est notamment venu s'objecter à la rente, pour quelques motifs.
Monsieur Castonguay préconise plutôt un régime individuel de retraite plus souple auquel les employeurs n'auraient pas à contribuer. Le salarié devrait notamment y assurer la part de l'employeur et y contribuer à hauteur de 3%. Avec la possibilité de se désengager.
Le même jour, l'Association canadienne des compagnies d'assurances de personnes a, elle aussi, émis des réserves sur de nouvelles cotisations à demander aux employeurs. Le président de l'Industrielle Alliance, Yvon Charest, qui n'est pas un poids léger dans le domaine, s'est interrogé sur l'à-propos d'ajouter un degré de protection capitalisé, alors que le Régime des rentes du Québec n'est capitalisé qu'à hauteur de 15%.
Il est possible, dit-il, que l'on ait à capitaliser davantage le régime dans l'avenir et que les employeurs doivent faire face à d'autres coûts que l'on ne voit pas encore.
D'ailleurs, a-t-il prévenu, l'espérance de vie s'est encore allongée, ce qui pourrait faire grimper les coûts.
Comme si ce n'était pas assez, de nouvelles normes comptables sont entrées en vigueur en 2013, qui, à l'Industrielle Alliance, ont pour effet de faire passer la facture de 25 à 40 M$.
Bref, le consensus sur la rente de longévité est désormais brisé, et on peut se demander si elle n'est pas en péril.
Sans l'employeur, la rente n'a pas d'avenir