Là où se trouve le danger
Quelques éléments de réflexion sont à prendre en considération, notamment au chapitre de la capacité des entreprises à investir et de leur expertise en dehors du minier.
Contrairement à ce que certains peuvent croire, il n'est pas aisé de lever du financement pour un projet minier. Investissement Québec ne peut mettre tous ses œufs dans le même panier et n'a pas les poches assez profondes pour tout financer. Même en appelant en renfort la Caisse de dépôt et le Fonds de solidarité, la capacité de la province à financer le Plan Nord demeure lilliputienne. Le Québec a besoin des capitaux extérieurs pour réaliser ses projets.
On peut avoir sur papier une étude qui prévoit qu'un projet de transformation sera rentable. Il faut cependant aussi que, dans les faits, il livre la performance promise. Et surtout, que les investisseurs croient qu'il la livrera. D'anciennes sociétés ayant pour noms Lithos (lithium) ou encore Ressources Orléans (wollastonite) avaient des projets prometteurs sur papier qui se sont soldés par d'importants échecs. Il y en a d'autres.
Ce n'est pas pour rien que plusieurs investisseurs miniers refusent de financer des projets industriels. Il s'agit simplement de deux secteurs d'activités différents, avec des marchés différents, et sans complémentarité d'expertise. Demander de faire les deux à la fois ajoute un risque considérable, que plusieurs ne sont pas prêts à courir. Non seulement est-on en train de réduire le nombre d'investisseurs à qui on pourra demander de l'argent, mais on leur demande du même coup plus d'argent (il faut faire les deux projets).
La mesure arrive alors que Québec augmente de nouveau les redevances minières. Bien qu'il soit exagéré de déchirer sa chemise sur le niveau qui sera demandé, il faut reconnaître que cette mesure, additionnée à la nouvelle, risque maintenant de créer un très mauvais sentiment dans le bassin de financement extérieur qui nous est nécessaire.
Québec semble avoir totalement oublié la période sombre du monde minier au tournant des années 90, alors que sous l'effondrement du prix de l'or, il ne se trouvait pratiquement plus de prospecteurs miniers dans la province. Seuls les entêtés André Gaumond et Paul Archer, de la société Virginia, continuaient de s'acharner à la Baie James, malgré les sobriquets dont certains les affublaient. Ils firent l'une des plus importantes découverte de la province avec Éléonore. Mais cela ne changea pas que pendant des années, à peu près personne n'explora au Québec.
Les prix étaient bas, les coûts d'exploitation plus élevés. Forcés de faire des choix devant des capitaux disponibles plus faibles, les promoteurs allaient à l'étranger, là où le rapport risque/rendement était meilleur.
C'est ce qui nous guette avec le projet de loi actuel, particulièrement si le cycle baissier s'accentue (et il s'accentuera assurément dans le fer, la demande chinoise étant structurellement insoutenable à long terme).
On avait initialement compris que le gouvernement introduirait des crédits d'impôt pour amener les minières à courir le risque de la transformation. C'est sans doute ce qu'il fera. Mais on ne peut imposer à une entreprise d'aller de l'avant avec un projet avec lequel elle ne se sent pas à l'aise.
La contrainte ne crée pas de partenariat et n'est pas l'amie du développement. Les parlementaires devraient bien y réfléchir avant de voter.
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