BLOGUE. Ça joue dur entre le CN et le CP, alors que l'ancien président du CN, Hunter Harrison, est prêt à quitter sa retraite pour aller se mettre à la tête de l'ennemi.
Devant la menace, le Canadien National vient de cesser de payer la pension de 1,5 M$ par année de monsieur Harrison, de même que certains autres avantages. Total de l'enveloppe contestée: 40 M$. La société demande maintenant aux tribunaux d'entériner sa décision.
Toute cette histoire a commencé il y a quelques mois lorsque Pershing Square Capital est entrée au capital du Canadien Pacifique et s'est mise à réclamer du changement. Les coûts d'exploitation du CP sont nettement plus élevés que ceux du CN, et Bill Ackman, le grand patron de Pershing, croit qu'Hunter Harrison serait en mesure de les abaisser passablement plus rapidement que la direction actuelle.
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Ça reste à voir, mais, à l'évidence, monsieur Harrison le croit aussi, lui qui n'a pas caché son intérêt à revenir comme chef de la direction.
L'ex grand patron est actuellement consultant pour Pershing et estimait personnellement que ses engagements de non-concurrence prenaient fin au 31 décembre 2011. Le CN allègue notamment qu'en agissant comme consultant, il les a violés.
Déjà Pershing Square se dît prête à prendre en charge l'enveloppe de 40 M$ qui pourrait échapper à son protégé.
Mais pourquoi?
Il appartiendra au tribunal de déterminer où se trouvent les droits de chacun. Au-delà des éléments légaux, cependant, heureusement que le ridicule ne tue pas, parce que Pershing Square pourrait bien ne plus avoir de poulain.
Monsieur Harrison fut en charge du CN de 2003 à 2009. Comment peut-on sérieusement être leader d'une société, prendre sa retraite, et trois ans plus tard passer à l'ennemi pour tenter de détrousser son ancienne équipe?
Le geste sonne faux même chez les plus ardents partisans du système capitaliste.
L'antichambre de la mort
En fait, la motivation de monsieur Harrison pourrait bien ne pas se trouver dans l'argent. Plutôt dans l'égo. Dans ce besoin de prouver qu'on est encore utile et capable. Dans le besoin d'accomplir un autre exploit. Même à 67 ans.
Notre éditeur émérite, Jean-Paul Gagné, chez qui l'on va souvent chercher lumière, nous racontait mardi que c'est un phénomène qu'il avait commencé à observer depuis quelques temps chez certaines de ses connaissances à la retraite.
Pour l'une d'elles, "la retraite est l'antichambre de la mort". Un état de désoeuvrement où l'on attend, dans une malheureuse oisiveté, le grand rappel.
Il est vrai que lorsque l'on a été président du CN et occupé à de grandes choses, il puisse falloir de grandes entreprises pour échapper à la morosité.
Une belle leçon pour tous les chefs de direction qui songent à ce qu'ils feront à la retraite: plus grand est le statut, plus grande peut aussi être l'erreur de jugement.
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