BLOGUE. Imaginez la scène. Je suis en train de prendre une bière sur une terrasse avec un ami et partenaire de badminton. Soudain, il me demande :«Penses-tu que la Bourse va revenir un jour?»
Malgré nos fréquentes rencontres, on ne parle pratiquement jamais de Bourse, préférant partager nos bons et mauvais coups au badminton. Cette fois, je venais justement de lui mentionner que le marché boursier demeurait difficile, cela dit sans raison particulière. Probablement que j’avais épuisé le badminton comme sujet de conversation. Et je sais qu’il a un certain intérêt pour les marchés financiers. C’est à la suite de ma remarque qu’il m’a lancé sa «grande» question.
Et moi, ma «petite» réponse : «C’est certain que la Bourse va revenir. C’est juste une question de temps…»
Et on a changé de sujet de conversation, se tournant vers la politique…
Après réflexion et à la suite de rencontres avec bien des investisseurs, j’ai réalisé que nombreux sont ceux qui se posent la même question.
Il a une désaffection généralisée et profonde pour la Bourse, sujet fréquent d’observateurs comme moi. Elle se reflète dans les entrées et les sorties d’encaisse (l’argent sort des actions vers des actifs comme les obligations et d’autres titres à revenu) et aussi dans l’humeur des investisseurs.
Ils sont de plus en plus à être convaincus qu’il y a quelque chose de brisé dans les marchés boursiers. Comme si la Bourse était truquée aux dépens des petits investisseurs.
Il n’y a pas que la mauvaise performance des principaux indices depuis 2000 qui pousse les investisseurs à ce genre de conclusion. Il y a les nombreuses fraudes et tout aussi nombreux fiascos qui font les manchettes régulièrement, jetant un ombrage assez négatif merci sur les financiers.
Il y a aussi la grande volatilité, perçue comme étant plus grande que jamais qui fait peur et qui donne l’impression que la Bourse est manipulée au profit des Goldman Sachs de ce monde.
Article fascinant
En faisant du ménage dans mes dossiers sur la Bourse qui remontent à mes débuts au journal en 1986, je suis tombé sur un reportage fascinant publié par le magazine Fortune. Dans un texte de quatre pages, le magazine explique en détails pourquoi les investisseurs sont en état de choc, craignant comme la peste et évitant tout ce qui ressemble à une action. Il cite entre autres Peter Lynch qui mentionne qu’il n’en revient pas de constater que les investisseurs aient lancé la serviette concernant la Bourse.
Ces derniers, entre autres, en avaient assez de la volatilité, qu’ils attribuaient aux manigances des gestionnaires institutionnels et des financiers.
Le magazine recommandait de ne pas avoir peur de ce «gros et méchant» marché boursier.
Cet article a été publié dans l’édition du Fortune du 9 avril 1990.