Passer à l'usine 4.0 sans s'embrouiller


Édition du 19 Mai 2018

Passer à l'usine 4.0 sans s'embrouiller


Édition du 19 Mai 2018

« Ce qu’il faut, ce n’est pas l’usine 4.0... mais bien l’entreprise 4.0 ! » selon ­Jonathan ­Gaudreault, directeur du ­Consortium de recherche en ingénierie des systèmes industriels 4.0, affilié à l’Université ­Laval.

Le virage 4.0 approche. Mais sans une vision claire, les PME québécoises risquent fort de manquer le tournant. Pour réussir à automatiser leurs usines, les firmes doivent d'abord savoir où elles veulent aller et avancer avec un engagement fort de leurs dirigeants.

Du moins, c'est l'avis d'Antoine Proteau, directeur de la science des données chez APN, une entreprise de Québec qui oeuvre dans les secteurs de l'aéronautique et des hautes technologies. Il sera conférencier le 18 septembre à l'événement Usine 4.0, organisé par le Groupe Les Affaires. « Le plus important, pour passer au 4.0, c'est d'avoir une vision, dit M. Proteau. Et celle-ci doit venir d'en haut, sinon rien ne se fait. »

Le cas de son entreprise illustre bien ses propos. En 2011, APN a fait ses premiers pas vers le 4.0 en connectant certaines de ses machines et en créant des bases de données. Pour y arriver, elle a toutefois dû créer elle-même un logiciel qui puisse le faire. Au fil d'essais-erreurs, APN a raffiné ses façons de faire et récolte aujourd'hui les succès en termes, entre autres, de profitabilité et de rapidité d'exécution.

Selon Antoine Proteau, la firme doit ce succès avant tout à l'engagement de ses dirigeants : ce sont eux qui ont lancé la vision du changement, et qui l'ont transmise au reste de l'entreprise. « Toute l'équipe de direction a été habilitée à prendre des décisions et à mettre en action des mesures concrètes », dit M. Proteau. Maintenant, comment agir et quelles mesures prendre ? Il conseille aux PME de s'inspirer de l'approche itérative privilégiée par beaucoup de firmes de la Silicon Valley : faire un petit changement ou projet qui implique peu de risques financiers, évaluer ses résultats, et rapidement recommencer. Petits tests, petits essais, petits succès. « Le but est de faire des essais à portée limitée, des preuves de concept pour voir si une idée fonctionne, et ensuite de reprendre celle-ci à plus grande échelle, de construire là-dessus et de faire d'autres essais. À force d'essayer, on trouve la bonne direction et ça fait boule de neige », dit Antoine Proteau.

Même si son engament vis-à-vis du 4.0 était claire, APN n'a donc pas mis cinq ans à développer son logiciel avant de le tester. Elle a au départ simplement engagé un étudiant en programmation pour tenter de connecter ses machines dans le but de connaître leur taux d'utilisation, ce qui s'est fait rapidement et à faible coût.

« Aujourd'hui, nous avons trois programmeurs, dit Antoine Proteau. Mais au départ, nos essais nous ont coûté seulement l'embauche d'un stagiaire, l'achat de câbles de réseau et le paiement de licences d'utilisation pour accéder aux contrôleurs. On parle de moins de 10 000 dollars. »

L'avantage de la pensée systémique

L'usine 4.0 se nourrit de l'interconnectivité des systèmes. Pour réussir à passer au 4.0, les dirigeants de PME doivent donc ainsi penser leur entreprise non pas comme un amalgame de services indépendants, mais bien comme un système uni et vivant. « Chaque service impacte les autres services, dit Antoine Proteau. Tout ce qu'on ajoute, des employés aux systèmes et logiciels, doit pouvoir s'imbriquer dans ce qui est en place. La notion d'interconnectivité est fondamentale si on veut une automatisation performante. »

Cette notion est si importante que Jonathan Gaudreault, directeur du Consortium de recherche en ingénierie des systèmes industriels 4.0, affilié à l'Université Laval, considère que le terme même d'usine 4.0 est dangereux, puisqu'il est trompeur. « Ce qu'il faut, ce n'est pas l'usine 4.0... mais bien l'entreprise 4.0 ! », dit-il. Le danger pour bien des entreprises est, selon lui, de voir cette révolution d'automatisation numérique uniquement comme une occasion de lancer un projet d'amélioration de la productivité. Le danger est aussi, pour un dirigeant, de refiler la responsabilité aux informaticiens et au directeur d'usine. « Penser comme cela, ça révèle déjà une mentalité 3.0. »

Parce que le vrai objectif de l'usine connectée et automatisée est qu'elle soit flexible et adaptable. Éventuellement, les systèmes autant que les décisions d'affaires devraient être automatisés. C'est donc non pas seulement l'usine qui doit être repensée, mais bien le modèle d'affaires en entier. Et pour cela, les dirigeants doivent être impliqués autant que le reste de l'entreprise. En effet, même si une firme fabrique un produit traditionnel comme des meubles, les consommateurs s'attendront dans dix ans à pouvoir dessiner et modifier le meuble qu'ils commandent. Celle-ci devra donc, qu'elle le veuille ou non, connecter ses systèmes et accueillir les nouvelles technologies. « Les consommateurs vont consommer différemment, dit Jonathan Gaudreault. Vous serez donc forcé de changer votre modèle d'affaires. C'est ça, la clé d'une transformation vers le 4.0. »

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