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ANALYSE - Les images des affrontements sanglants en Ukraine entre les forces de l'opposition et les forces gouvernementales ont fait le tour du monde. Ce qu'on voit moins, en revanche, c'est la partie d'échecs géopolitique qui se joue actuellement en Ukraine, entre la Russie et l'Europe.
L'enjeu sous-jacent à cette crise politique qui ébranle l'Ukraine est la future appartenance de ce pays de 45 millions d'habitants à deux sphères d'influence: celle de l'Union européenne ou celle de la Russie. Car l'Ukraine peut difficilement jouer ces deux cartes à la fois.
Cette crise a débuté à la fin du mois de novembre. À la surprise générale, le président ukrainien Viktor Ianoukovitch refuse de signer, comme cela était envisagé, un accord d’association et de libre-échange avec les 28 pays de l'UE.
La réaction populaire ne se faire ne pas attendre en Ukraine. Beaucoup de citoyens descendent alors dans les rues pour manifester leur colère, voyant dans cette décision un geste de rupture avec l'Union européenne, de qui une part importante de la population ukrainienne - surtout dans l'ouest du pays - souhaite se rapprocher.
Depuis des mois, l'Ukraine faisait face à un dilemme de taille: renforcer ses liens économiques avec l'Europe ou renforcer ses liens économiques avec la Russie de Vladimir Poutine.
Les pressions de Moscou et son aide financière à l'Ukraine - le pays, en difficulté, négociait d'ailleurs un prêt avec le Fonds monétaire international avant la crise politique - ont finalement convaincu Kiev de pencher du côté de la Russie, soulignent les analystes.
Il faut dire que l'Ukraine est très dépendante de puissant voisin. Elle réalise près du tiers de son commerce extérieur avec lui, incluant ses approvisionnements en gaz naturel. L'Ukraine est aussi un partenaire clé pour la Russie, qui y achemine un peu plus de 5% de ses exportations.
Projet d'union économique eurasiatique
Moscou a un autre intérêt majeur pour garder l'Ukraine dans sa sphère d'influence. Le gouvernement russe veut créer une union douanière qui regrouperait la Russie, le Kazakhstan et la Biélorussie.
Une union douanière qui aurait la vocation de devenir un jour une union économique eurasiatique à laquelle la Russie souhaite ardemment que l’Ukraine participe. Il va sans dire que le projet russe aurait beaucoup moins de portée économique et politique sans l'Ukraine, un pays grand comme la France.
De plus, une Ukraine ancrée davantage à l'Ouest, dans un premier temps, avec une association et accord de libre-échange, et, dans un deuxième temps, avec une éventuelle adhésion à l'UE dans les prochaines années, marginaliserait la Russie en Eurasie.
Reste à voir comment les Ukrainiens, la Russie et l'UE trouveront une sortie à cette crise géopolitique. Car cette crise ne peut se régler uniquement en Ukraine, malgré l'accord intervenu le 21 février, entre le président Ianoukovitch et les responsables de l'opposition.
Trop d'intérêts géostratégiques sont en jeu.
