Or, il est rare d’avoir ainsi accès au fond de la pensée d’autrui. En effet, pouvez-vous réellement évaluer de 1 à 10, par exemple, la considération réelle de votre collègue de bureau pour votre boss, l’amour que vous porte votre conjointe, ou encore l’estime qu’a pour vous votre meilleur ami? Hein? Impossible, n’est-ce pas? Pourtant, nous faisons tous, inconsciemment, de telles évaluations, à longueur de journée. Et ce, en nous basant sur de très grossières estimations, à savoir sur ce que nous croyons être les motivations de l’opinion de l’autre…
Voilà pourquoi les autres ont une influence indéniable sur nous, qui que nous soyons, mais pas l’influence que l’on peut croire a priori. Non, ce ne sont pas leurs idées et leurs arguments qui ont un réel effet sur nous, mais plutôt la vision que nous avons d’eux et de leurs schémas de pensée, pour ne pas dire la projection de nos propres pensées sur les autres. C’est bien simple, nous nous auto-influençons, faute de communiquer de manière franche et transparente avec autrui…
«Nos décisions sont socialement interdépendantes. Car les évaluations et les choix des autres ont un impact sur notre perception d’eux, et par suite, une influence généralement insoupçonnée sur nos propres décisions», indiquent dans leur étude Mme Orhun et M. Urminsky.
«Même si les préférences d’autrui sont différentes des nôtres, nous en tenons toujours compte car nous le percevons comme un reflet de nous-même, un reflet plus ou moins parfait. En fait, notre perception d’autrui découle fondamentalement de notre compréhension de nous-mêmes», ajoutent-ils. Impressionnant, non?
Le poète français Paul Éluard disait dans Le Visage de la paix : «Nous avons inventé autrui | Comme autrui nous a inventé | Nous avions besoin l’un de l’autre»…