Le Dr Michel Gagner n'en est pas à ses premiers contacts avec la chirurgie robotique. Le 7 septembre 2001, il faisait partie de l'équipe de chirurgiens ayant opéré depuis New York une patiente à Strasbourg, en France, par l'intermédiaire d'une connexion à haut débit et d'un robot chirurgien. Baptisé opération Lindbergh, l'exploit avait été ultramédiatisé et paraissait annonciateur d'un bel avenir pour la téléchirurgie.
À l'époque, l'avenir de la chirurgie robotique semblait radieux, et Michel Gagner pensait que la technologie était appelée à continuer sur sa lancée. Il en reste convaincu, même si cet avenir est plus lent à se concrétiser. «La téléchirurgie pourrait être utile pour opérer à distance dans des stations arctiques au Canada, sur des bateaux ou même dans l'espace», explique Michel Gagner.
Or, quelques jours après l'exploit médical, survenaient les attentats du 11 septembre à New York, qui n'ont pas manqué d'affecter l'économie. En 2003, le marché de robotique chirurgicale s'est consolidé lorsque Intuitive a mis la main sur son concurrent Computer Motion, dont le robot, ambitieusement baptisé ZEUS, avait servi à réaliser l'opération Lindbergh.
Avec l'arrivée prochaine de nouveaux acteurs, Michel Gagner espère que la chirurgie poursuivra son évolution plus rapidement. «Je pense qu'on pourra un jour avoir des robots qui opéreront eux-mêmes, estime le chirurgien. Mais c'est quand même le chirurgien qui décidera comment la chirurgie aura lieu ; ensuite, il pèsera sur un bouton, puis ce sera fait. L'avantage, c'est qu'un robot peut poser des gestes impossibles pour un humain, et à une vitesse inédite.»
La robotique pourrait du reste conduire les médecins à repenser la nature même de ce qu'est une chirurgie, notamment grâce à la nanorobotique. Même si elle est encore expérimentale, la nanorobotique pourrait transformer fondamentalement la manière dont on traite le cancer, entre autres. Sylvain Martel, un professeur de Polytechnique, a mis au point un procédé en laboratoire qui recoure à des nanomatériaux pour traiter le cancer de manière plus ciblée : «Ce qu'on essaie de faire, c'est de développer des plateformes permettant de transporter des molécules éprouvées pour combattre le cancer là où les cellules cancéreuses se trouvent», résume le professeur.