Les 250 000 emplois des libéraux
Le développement est un peu plus long ici, mais restez avec nous.
Monsieur Charest promet que les libéraux créeront 250 000 emplois dans le prochain mandat. Un engagement reçu avec scepticisme en certains milieux.
À titre de comparaison, Desjardins, qui est sur le même horizon, parle plutôt de 135 000 emplois.
D'où le scepticisme. Desjardins est peut-être cependant un peu basse dans ses projections de croissance du PIB, avec une moyenne de 1,8%.
Malgré tous les enjeux de productivité et de démographie, il se pourrait bien que la croissance soit supérieure.
Quelque chose nous dit qu'une bonne partie des gains supplémentaires anticipés par les libéraux tient au développement du nord, et, particulièrement, à l'octroi de blocs d'énergie à faible prix à des entreprises de transformation.
L'approche n'est pas nécessairement mauvaise. Mais l'après 2017 soulève des interrogations.
Une bonne partie du Plan Nord repose sur le développement des mines de fer. Il suffit de penser aux 10-13 G$ envisagés pour le lac Otelnuk (Adriana-Wisco), aux 4,5 G$ pour Kémah et Labmag (New Millenium/Tata) et aux 2,1 G$ du Mont-Wright (ArcelorMittal).
Ces projets reposent sur l'hypothèse de la poursuite du super cycle actuel.
Mais voyons de plus près les fondamentaux.
Même si elle ne compte que pour 11% du PIB mondial et 20% de la population, la Chine a consommé l'an dernier environ 50% de l'acier produit dans le monde (de même que de 30 à 40% du cuivre, du nickel, du zinc, du plomb et de l'aluminium).
Pareille demande est insoutenable à long terme, le cycle devra un jour casser.
Plus tôt cette année, la Deutsche Bank évaluait que le cycle du fer pourrait bien se terminer vers 2017, et les prix passer de 130 $ US la tonne qu'ils étaient en début d'année (actuellement autour de 120$) à 80$ US.
Forcément, cela voudra dire des fermetures.
L'idée d'essayer d'attacher de la transformation (avec nos blocs d'énergie) n'est pas mauvaise. Elle pourrait éventuellement faire en sorte qu'une mine qui fermerait en temps ordinaire (faute d'être compétitive avec les pays émergents), maintiendrait sa production.
N'empêche, il nous faut bien jauger le risque d'une économie très lourdement pondérée dans les ressources.
L'économiste Stéfane Marion, de la Nationale, indiquait en début d'année que les investissements dans le monde minier pourraient augmenter de 62% en 2012 pour atteindre 4,4 G$. Ce n'est plus très loin des 5 G$ d'investissements prévus pour le secteur manufacturier.
Si jamais le cycle devait éclater peu après que nos investissements aient été effectués, la structure d'emplois du Québec serait alors à risque d'être lourdement frappée. Et l'on pourrait regretter d'avoir orienté nos efforts de création d'emplois de ce côté.
Entre 135 000 emplois créés en pondération avec l'économie et 250 000 en concentration dans un secteur, mais de façon temporaire, les 135 000 sont probablement préférables. Parce que lorsqu'une économie se déstructure, le ressac peut être drôlement plus important.