Se dirige-t-on vers une nouvelle crise économique? Encore à Noël, le ciel semblait pourtant dégagé et la plupart des stratèges prédisaient une hausse modérée des bourses nord-américaines en 2016. Boom, sans crier gare, tout vient soudainement de se renverser, alors que celles-ci sont en décrochage de plus de 8% sur le début de l'année. Pourquoi?
La réponse est essentiellement chinoise, comme l'illustre éloquemment le recul de plus de 18% de la Bourse de Shanghai en quelques jours.
Plusieurs raisons fondamentales peuvent expliquer le recul chinois. La maison Addenda Capital est sans doute celle qui identifie le mieux l'élément déclencheur de la déroute.
Depuis plusieurs mois, le marché boursier chinois est à des niveaux d'évaluation discutables, et les autorités du pays y vont de diverses manœuvres pour tenter de le soutenir. Elles ont commencé par resserrer les critères de vente à découvert, puis ont interdit à certains investisseurs de vendre leurs actions. Elles sont ensuite entrées sur le marché pour acheter directement des actions, forçant des sociétés sous leur contrôle à en faire autant.
Le calme est revenu. Mais seulement temporairement. Un des éléments techniques soupçonné d'être à l'origine de la débâcle actuelle réside dans ceci: l'interdiction de vente s'appliquant aux gros actionnaires chinois venait à échéance le 8 janvier. Il ne fait pas de doute que face à l'arrivée de cette échéance, et sans indications politiques à l'effet que la mesure serait reconduite, nombre d'investisseurs non touchés par l'interdiction ont décidé de liquider, pendant que les acheteurs se retiraient.
Le marché chinois a grimpé de plus de 100% en 2014 et 2015. C'est en complète désynchronisation avec un PIB qui devrait avoir cru en 2015 autour de 6,9%. Il y a probablement une partie de rattrapage dans cette progression, mais il y a aussi un facteur spéculatif important. Pour différentes raisons, qui peuvent s'expliquer en partie par l'encouragement constant du gouvernement chinois auprès de ses citoyens à diriger leur épargne sur le marché boursier, la valeur de plusieurs entreprises chinoises semble aujourd'hui en porte-à-faux avec la force de l'économie du pays.
Même avec un recul de 18%, les bourses chinoises apparaissent toujours surévaluées. L'indice composite de Shanghai est à un raisonnable multiple de 15 fois les bénéfices, mais l'indice n'est apparemment pas représentatif de l'ensemble du marché. Bloomberg rapporte que le multiple médian des sociétés chinoises est plutôt de 55, ce qui est élevé. À titre d'illustration, la valeur de Facebook, qui a nettement plus de potentiel à long terme que la médiane chinoise, n'est qu'à 34 fois les bénéfices.
La crainte des investisseurs partout dans le monde est évidemment que le recul ne vienne influencer la consommation de la Chine.
La deuxième économie mondiale est par exemple responsable de près de 50% de la demande en fer. Ce n'est pas pour rien que le Plan Nord, principalement appuyé sur cette ressource, bas de l'aile depuis plusieurs mois.
Le dollar canadien, pendant ce temps, subit les foudres des investisseurs. Les secteurs miniers et pétroliers demeurent d'importants catalyseurs pour notre économie. Devant des fondamentaux qui s'affaiblissent au quotidien, les investisseurs offrent chaque jours moins cher pour une devise dont le pouvoir d'achat est incertain dans les prochains trimestres.
En route vers une nouvelle crise économique?
C'est possible, mais l'affirmer sans nuance est prématuré.
La Chine n'est pas une économie de libre marché. En raison de différentes restrictions sur l'investissement étranger, les capitaux de la Bourse de Shanghai sont principalement locaux. Il n'est pas dit que le gouvernement n'implantera pas de nouvelles mesures destinées à lisser dans le temps la valeur des cours boursiers où à réduire la descente envisagée.
Il est en outre difficile d'évaluer l'impact que pourrait avoir le dégonflement des bourses chinoises sur le PIB du pays. Combien de consommateurs sont significativement exposés sur le milliard de citoyens chinois?
Pendant ce temps, la première économie mondiale, celle des États-Unis, avance. Et ce depuis plusieurs trimestres. Malgré un contexte de ralentissement en Chine. La faiblesse des prix du pétrole est aussi un stimulus pour l'économie mondiale.
Trop tôt pour paniquer, mais aussi trop tôt pour voir une grande occasion d'investissement.
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