Vers une révision du droit familial
Alors, est-ce que le CELI pourrait faire partie du patrimoine familial? Les avis sont partagés sur la question. Certains croient que c’est inévitable. D’autres affirment au contraire qu’il s’agit d’un faux problème. Depuis 1989, des progrès immenses ont été réalisés en matière d’égalité économique homme-femme. Il reste encore du chemin à faire, mais les avancées ont été telles qu’on se demande maintenant si le patrimoine familial ne couvre pas aujourd’hui trop large, avant même de songer y ajouter le CELI.
On aura bientôt une réponse. Ou du moins une piste. À la suite de l’affaire Éric et Lola en janvier 2013, le ministre de la Justice de l’époque, Bertrand St-Arnaud, a mis sur pied un comité consultatif afin de guider le gouvernement dans une éventuelle révision du droit familial. Depuis plus de deux ans, ce comité passe en revue les articles du droit de la famille, un chapitre du Code civil un peu rapiécé et parfois anachronique. Il déposera son rapport en juin.
Ses recommandations pourraient redéfinir l’étendue du patrimoine familial, autant dans ce qu’il contient que dans les situations dans lesquelles il sera appliqué.
Quant au CELI, j’ai eu un entretien très enrichissant avec Jocelyne Jarry, avocate de droit familial, chargée de cours à la Faculté de droit de l’UdeM et enseignante à l’École du Barreau. Elle m’a fait remarquer que l’inclusion du CELI dans le patrimoine familial est peu pertinente dans l’état actuel des choses.
La juriste rappelle que les biens et les actifs qui ne font pas partie du patrimoine familial et qui sont accumulés durant l’union doivent être partagés en vertu du régime de la société d’acquêts, celui qui s’applique encore par défaut aujourd’hui.
Or, dit-elle, il y a eu un revirement complet dans le choix du régime matrimonial depuis 25 ans. Très peu de couples se tournent vers le régime de séparation de biens, ignorant sans doute l’existence de cette option depuis l’instauration du patrimoine familial.
La grande majorité des couples mariés depuis 1989 le sont sous le régime de la société d’acquêts. Et comme les comptes de banque et les CELI, accumulés durant le mariage, font partie des acquêts, que vous déposiez votre argent dans un REER ou à l’extérieur pendant que vous flirtez avec la stagiaire ne changera pas grand-chose dans l’éventualité d’un divorce. Vous devrez diviser l’argent.
Le problème n'est plus là à mon avis. Les gens ne choisissent plus entre un régime matrimonial et un autre. L'alternative aujourd'hui se pose autrement: se marier ou non? C'est le plus souvent non. À cet égard, il est plus pertinent de se demander si la loi sur le patrimoine familial devrait s'étendre aux couples non mariés avec enfant. On le saura dans quelques semaines.
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