Des artistes et des entrepreneurs

Publié le 19/05/2012 à 00:00

Des artistes et des entrepreneurs

Publié le 19/05/2012 à 00:00

Par essence, les entrepreneurs sont des créatifs. Il faut avoir de l'imagination, de l'inventivité et de l'audace pour lancer une entreprise. Il faut aussi du flair et le sens de l'Histoire. Tout à fait ce qu'on peut attribuer aux créateurs, dont les idées finissent par influencer une société.

Prenez Joseph-Armand Bombardier. Du fond de son garage, à Valcourt, il se demandait comment faire pour que les gens puissent se déplacer convenablement l'hiver. Les malades pouvaient difficilement se rendre à l'hôpital, comme les médecins pouvaient difficilement se rendre au chevet de leurs patients. Il en savait le terrible prix, puisqu'il avait perdu un fils dans ces circonstances.

C'est ce qui l'a inspiré à concevoir l'autoneige, sortie tout droit de son cerveau et de ses mains, pour ensuite donner naissance à la motoneige que nous connaissons. Imagination, inventivité, sens de l'histoire... Cet obscur mécanicien des Cantons-de-l'Est les possédait tous. En d'autres temps, il aurait pu tout aussi bien inventer l'automobile que l'avion. Il avait la passion de créer dans le sang.

Si vous passez un jour à Baddeck, en Nouvelle-Écosse, vous pourrez y visiter le musée dédié à Alexander Graham Bell. On le connaît comme l'inventeur du téléphone, mais le récit de sa vie est truffé d'innovations de toutes sortes. Bell était ce qu'on appelle aujourd'hui un entrepreneur en série, toujours à l'affût d'idées nouvelles, aussi bien pour perfectionner les cerfs-volants que les avions. C'est d'ailleurs lui qui a fait voler le tout premier appareil en sol canadien, le Silver Dart, à l'hiver 1909.

Créatifs, Alexander Graham Bell et Joseph-Armand Bombardier ? Assurément. Des inventions aussi décisives que le téléphone ou l'autoneige frappent l'imaginaire et confèrent une aura de noblesse à des personnages de cette envergure. Pourtant, aux yeux de certains, la notion de créativité coexiste mal avec l'utilitaire. Comme s'il lui fallait être désincarnée. Être détachée de toutes contingences matérielles.

Évidemment, un monde sépare l'atelier d'un peintre abstrait du garage d'un mécanicien de Valcourt. Encore que, malgré une démarche éminemment personnelle, le premier préférerait quand même ne pas être qualifié de génie méconnu... Et les designers de mode eux-mêmes rêvent de voir leurs créations faire l'objet d'un défilé dans les grandes capitales. Innover oui, être connu, encore plus.

Ne pas se contenter des modèles établis

Mais au fond, c'est pareil pour tout entrepreneur. Entre Jean Coutu, qui révolutionne l'art de la pharmacie à partir d'une idée qui a germé dans sa tête, et Martin Picard, qui réhabilite (entre autres choses) la façon de servir le porc à toutes les sauces, surgit un élément commun : la créativité. Ne pas se contenter des modèles établis. Repousser les frontières. Se fier à une vision. Et se croiser les doigts en espérant être reconnu à son mérite.

Il faut le dire et le redire, parce qu'on a tendance, au Québec, à regarder de haut les entrepreneurs, surtout s'ils ont réussi et qu'ils font de l'argent. Comme si leur prospérité assombrissait l'intérêt de leur cheminement créatif.

Nous sommes naturellement héritiers des Français et de leur méfiance pour ce qui touche à l'argent. «Derrière chaque grande fortune se cache un crime», a écrit Honoré de Balzac, une opinion qui a encore cours aujourd'hui et qui ne facilite pas les choses. Le vieux fond catholique n'est jamais bien loin.

D'où la difficulté de réconcilier l'idéal de l'expression et celui de l'entrepreneuriat, étant donné que ce dernier parcours mène parfois, mais pas toujours, à la richesse, et qu'il est bien connu que les artistes se doivent de mourir dans l'indigence... Mais si nous voulons évoluer en tant que société mature, il va nous falloir mettre à contribution toutes les énergies créatrices dans tous les domaines où elles peuvent se manifester. Ailleurs, sur la planète, la course à l'innovation est un plan de match collectif. Les succès des uns permettent aux autres de s'éclater, et tous s'inspirent mutuellement. Pourquoi pas ici ?

En cette période où on glorifie la créativité à la québécoise, il convient d'élargir le cadre pour inclure tous ceux et toutes celles qui innovent dans leur domaine. Il nous faut autant de Jean-Paul Riopelle et de Marie Saint Pierre que de Guy Laliberté ou de Joseph-Armand Bombardier.

DE MON BLOGUE

Indignés

Les voilà de retour

Il y a indignés et indignés. En Espagne et en Grèce, là où le taux de chômage chez les jeunes dépasse maintenant 53 %, on peut comprendre l'impatience qui gagne tout un pan de la population qui perd espoir. Toute une génération est en train de faire les frais de l'incurie des dirigeants passés. Mais ici ?

Vos réactions

«Et justement, n'attendons pas d'être rendus comme ces pays, le gouvernement fait quelques demandes de nouveaux frais et c'est la crise. C'est mieux d'accepter ces petits gestes d'austérité aujourd'hui que de très grands gestes d'austérité plus tard [...] Dans mes années d'études, à 18 ans, on ne bénéficiait même pas d'un tarif d'étudiant pour prendre l'autobus.»

- travailleur

«Quoique nous ne soyons pas sans taches, les Canadiens vivent présentement une "ère de rationalisation économique" qui s'effectue par paliers, mais le Canada n'échappera pas à des tourments qui lui sont propres. C'est la même chose pour le Québec qui est dans de beaux draps avec une économie presque rachitique et limitée à ses ressources naturelles.»

- ybertrand

rene.vezina@tc.tc

blogue > www.lesaffaires.com/rene-vezina

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