Acheteurs recherchés pour eau de glaciers

Publié le 02/10/2010 à 00:00

Acheteurs recherchés pour eau de glaciers

Publié le 02/10/2010 à 00:00

Un mirage, l'exportation d'eau en vrac ?

Isolée sur l'île Baranof, en Alaska, la petite ville de Sitka tente depuis des décennies d'exporter son or bleu. Elle a même fait construire un aqueduc pour amener l'eau de glaciers jusqu'au port. La municipalité a signé un contrat avec une coentreprise qui veut expédier la ressource en Inde, en Chine et dans les Caraïbes. Mais quatre ans plus tard, aucune goutte n'a pris le large. Faute de navires pour transporter l'eau... et de clients.

En vertu de l'entente, True Alaska Bottling peut puiser dans l'aqueduc municipal un maximum de 33,6 millions de gallons d'eau par jour (127,2 millions de litres), soit l'équivalent d'une cinquantaine de piscines olympiques. En principe, l'entreprise a le droit d'utiliser chaque année jusqu'à 2,9 milliards de gallons (11,2 milliards de litres) : le contenu de 4 300 piscines. Toute cette flotte rapporterait 29 millions de dollars à la municipalité. " Nous avons cette eau qui coule dans l'océan, dit Garry White, directeur général de la Sitka Economic Development Association. Pour nous, c'est une façon de faire du développement. "

Alors que les initiatives du genre ont soulevé des tollés au Canada, très peu d'opposants se sont manifestés dans la petite ville de 9 000 habitants. Pour organiser les expéditions, True Alaska Bottling s'est associée à S2C Global Systems. Ensemble, elles ont fondé une société à responsabilité limitée, Alaska Resource Management (ARM), pour organiser les premières exportations régulières d'eau par bateau du monde.

Dans son dernier rapport trimestriel à la Securities and Exchange Commission (SEC), S2C affirmait que sa coentreprise serait en mesure de charger, " d'ici six à huit mois ", un premier navire de type " Suezmax " de 41 millions de gallons. L'entreprise prétendait alors mener de sérieuses discussions avec un armateur. " Toutefois, S2C nous a fourni de fausses informations, dit Rod Bartlett, associé chez S2C et dirigeant de ARM. En fait, ils n'avaient pas de navire... " Un " pépin " qui pourrait repousser les premières expéditions à la fin de 2012. " Le problème, c'est que l'exportation d'eau, c'est nouveau ", explique-t-il. Aucun armateur sérieux n'accepte de s'engager pour un contrat de 5 à 15 ans, comme l'exige le modèle d'entreprise.

Pour éviter ce genre de contrariétés à l'avenir, M. Bartlett tente de convaincre un armateur de lui revendre un navire en construction dans un chantier maritime. " Avec la crise financière, le marché des pétroliers s'est brusquement effondré, ajoute M. Bartlett. J'ai une liste d'une dizaine de vaisseaux en construction. Nous pourrions en racheter un et le modifier pour le transport d'eau. "

Bref, avant qu'un premier transocéanique embarque ses premiers gallons d'eau des glaciers d'Alaska, S2C a d'énormes problèmes à régler.

Coût exorbitant

ARM n'a donc toujours pas de navire... ni de clients. La société n'a signé aucun contrat ferme jusqu'ici.

" En Irak, nous avons une entente de principe avec une entreprise qui fournira l'armée américaine en eau ", dit M. Bartlett. Si ce contrat se matérialise, S2C utilisera son hub (carrefour) de distribution d'eau, qu'elle compte construire au sud de Bombay, en Inde. Elle transférera ensuite sa cargaison dans de plus petits navires à destination de l'Irak, notamment vers le port d'Umm Qasr qui ne peut pas accueillir de si grands navires.

Sinon, l'eau pourrait s'y rendre dans des cruches de 18 litres. S2C veut construire une grande usine d'embouteillage près de son carrefour indien et faire affaire avec un distributeur local pour livrer l'eau partout en Inde.

Pour James McNiven, de l'Université Dalhousie, en Nouvelle-Écosse, c'est la seule façon de rentabiliser le transport de l'or bleu. Sans embouteillage, " il n'y a pas de marché, à moins que l'importation d'eau soit lourdement subventionnée ", dit-il. Vendue sur les étalages des commerces de détail, la ressource vaut jusqu'à 1 000 fois plus cher.

Mais pour l'eau en vrac, c'est autre chose. Le professeur d'administration a dirigé des recherches sur l'exportation d'eau en vrac par bateau de la Nouvelle-Écosse au Texas. Selon lui, ce scénario est voué à l'échec. Après son transport sur des milliers de kilomètres, le coût de revient de l'eau est exorbitant.

Une fois arrivé en Inde, le gallon d'eau, payé 1 ¢ à la Ville de Sitka, coûtera 7 ¢. " C'est dix fois plus cher que le coût de l'eau dessalée ", convient Rod Bartlett.

hugo.joncas@transcontinental.ca

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