Le gouvernement Couillard doit revoir les services de garde


Édition du 24 Mai 2014

Le gouvernement Couillard doit revoir les services de garde


Édition du 24 Mai 2014

Par Jean-Paul Gagné

Il a suffi de quelques jours au cours desquels les milieux intéressés ont exprimé leurs inquiétudes pour que la ministre de la Famille, Francine Charbonneau, se ravise et lève le moratoire prévu sur l'attribution de nouvelles places subventionnées en garderie.

La volte-face du gouvernement libéral vient du fait que des projets d'installation avaient déjà été autorisés et que leur annulation aurait eu des conséquences importantes pour leurs promoteurs et pour les parents qui attendent ces places. Environ 6 300 places se seront ainsi ajoutées au réseau cette année, malgré les intentions du gouvernement Couillard de reporter le développement de ce programme. On sait que le gouvernement s'affaire à gratter les fonds de tiroir pour contenir le déficit prévu pour 2014-2015 à 1,75 milliard de dollars.

Ce revirement démontre bien la sensibilité du chef libéral à l'égard des services de garde à l'enfance. M. Couillard avait déjà fait preuve de prudence en rejetant la proposition du ministre péquiste des Finances, Nicolas Marceau, de porter à 8 $ en septembre 2014 et à 9 $ en septembre 2015 la contribution parentale quotidienne pour un enfant confié à un centre de la petite enfance (CPE), à une garderie privée subventionnée ou au service de garde d'une école. M. Couillard s'en était tenu à proposer d'indexer ce tarif au coût de la vie. Le gouvernement péquiste proposait aussi l'indexation à compter de 2016.

Puisque l'annonce du ministre Marceau a été bien reçue, le gouvernement Couillard devrait se résoudre à hausser la contribution des parents pour les services de garde destinés aux enfants de cinq ans et moins. Il pourrait justifier cette décision par le fait que la situation financière du gouvernement est critique et en faisant valoir que les parents ne contribuent plus que 13,5 % du coût de ce service, par rapport à 20 % en 1997-1998, la première année du programme, et à 17,2 % en 2004-2005, à la suite de la hausse de la contribution parentale quotidienne de 5 $ à 7 $. Une augmentation de cette contribution à 9 $ porterait à environ 16 % la part des coûts payée par les parents.

En ce qui concerne la garde en milieu scolaire, l'enjeu est différent, puisque la contribution de l'État, qui est minime (4,55 $ par enfant, par jour), réduit le crédit d'impôt provincial dont les parents peuvent bénéficier et diminue la déduction fiscale fédérale pour frais de garde accessible à l'un des parents. Une hausse de la contribution parentale au service de garde en milieu scolaire (à 9 $ par exemple) accroîtrait le manque à gagner des parents sur le plan fiscal.

Revoir le programme des garderies

S'il veut vraiment s'attaquer au coût des services de garde (2,7 G$ en 2014-2015), le gouvernement libéral doit se dissocier de l'approche idéologique donnée à ce programme sous le règne péquiste. Ainsi, quand le gouvernement Marois a annoncé l'ajout de 15 000 nouvelles places subventionnées, elle en a réservé 12 750 aux CPE, soit 85 % du lot, et en a attribué 2 250 aux garderies privées subventionnées.

Or, ce choix avait un impact important pour les contribuables, puisque les places en CPE coûtent plus cher à l'État. En plus d'être hébergé aux frais des contribuables, un CPE ne paie ni impôt ni taxes. Ses employés sont syndiqués et rémunérés selon des conditions semblables à celles des salariés du secteur public, régime de retraite compris. À l'opposé, les garderies privées subventionnées doivent financer leur immeuble, acheter tout ce qui est nécessaire au bon fonctionnement de l'établissement, y compris le matériel éducatif. Leurs propriétaires sont responsables des risques financiers que représente leur entreprise, ce qui rend légitime le droit de faire un profit raisonnable et d'accumuler une réserve financière pour les imprévus.

Par ailleurs, même s'ils n'ont pas un but lucratif, les CPE ont aussi besoin d'une réserve financière, ce qui rend plutôt odieuse l'idée de leur enlever les excédents accumulés.

Une optimisation des réseaux

Le programme des services de garde à la petite enfance a définitivement besoin d'être optimisé.

Tout d'abord, il serait préférable sur le plan financier d'attribuer de nouvelles places subventionnées à des garderies privées non subventionnées qui disposent d'espace inutilisé. Pour une raison purement idéologique, c'est une option que le PQ ne pouvait pas envisager.

Par ailleurs, le gouvernement devrait encourager des regroupements de CPE. Non seulement cela permettrait d'améliorer leur gouvernance et leur gestion (la moitié des CPE sont déficitaires), mais ce système pourrait bénéficier de synergies et générer des économies d'échelle.

Québec doit aussi tenter de savoir pourquoi le taux de présence des enfants dans les CPE est à la baisse (de 84 % en 2001-2002 à 78 % en 2012-1013), ce qui semble indiquer une perte d'efficacité.

Le gouvernement Marois avait créé un groupe d'étude sur les places en CPE et en milieu familial. C'est tout le système qu'il faut examiner.

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