[La translation par des robots, à utiliser avec une caution]


Édition du 16 Avril 2016

[La translation par des robots, à utiliser avec une caution]


Édition du 16 Avril 2016

Par Claudine Hébert

[Photo : Shutterstock]

L'utilisation des outils de traduction automatisée est devenue monnaie courante. À elle seule, la plateforme de Google Translate traduit plus de 400 millions de pages par jour.

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«C'était l'équivalent de la production annuelle du Bureau de la traduction avant mon départ à la retraite, il y a trois ans», dit Donald Barabé, ancien vice-président des services professionnels du Bureau de la traduction (BdT). Cet organisme fédéral veille à transmettre des communications aux citoyens dans les deux langues officielles.

Pourtant, ces outils ne font pas l'unanimité, notamment en ce qui concerne la traduction de documents gouvernementaux, susceptibles d'être délicats. Pétition de plus 600 traducteurs en colère, mécontentement du NPD, questionnement de la part des communautés francophones d'un bout à l'autre du pays : l'outil de traduction automatisée développé par le Centre national de recherches Canada (CNRC) pour les 375 000 fonctionnaires fédéraux fait jaser.

La mise en service du nouvel outil (on ne lui a pas encore trouvé de nom), qui devait avoir lieu le 31 mars, a été reportée à une date indéfinie. Le logiciel a besoin de certains ajustements dans les deux langues. (NDLR Il n'a pas été possible d'obtenir une entrevue du BdT à ce sujet.)

L'idée de cet outil de traduction automatisée a été proposée par Donald Barabé, et un collègue, au Commissariat aux langues officielles et à la direction du Conseil du Trésor il y a quatre ans. L'objectif de départ était de venir en aide aux employés fédéraux dans leur compréhension personnelle de textes écrits dans l'une ou l'autre des langues officielles. L'argument suivant portait sur la sécurité.

Selon le BdT, les fonctionnaires fédéraux ont utilisé Google Translate plus d'un million de fois l'an dernier pour traduire des documents.

«Ces documents traduits deviennent systématiquement la propriété de Google. Quand on sait que Google, tout comme Microsoft et Facebook, est visée par le Patriot Act, cela veut dire que des documents du gouvernement du Canada peuvent se retrouver dans les mains du gouvernement américain. Cela constitue un enjeu fondamental», explique M. Barabé.

À ce propos, poursuit-il, les pays de l'Union européenne disposent déjà de leur propre outil de traduction automatisée.

À des fins personnelles uniquement

Le danger, concède M. Barabé, réside dans les conditions d'utilisation.

«Bien qu'ils soient devenus indispensables dans les cabinets de traduction, ces outils de traduction automatisée ne traduisent pas tout et surtout ne traduisent pas correctement les contenus. Ces outils doivent donc servir uniquement à un usage personnel. En aucun cas, ils ne doivent être employés dans les communications internes, et encore moins externes», affirme-t-il.

L'Ordre des traducteurs, terminologues et interprètes agréés du Québec ne s'est pas prononcé sur l'outil.

Son président, Réal Paquette, préfère nous diriger vers le site Internet de l'Ordre, où l'on publie une mise en garde sur les dangers que présentent ces outils de traduction automatique lorsqu'ils sont mal employés. «Ce sont des outils à usage personnel, pour faciliter la compréhension. Il ne faut surtout pas s'en servir pour des communications officielles ni des échanges commerciaux, à moins que le résultat obtenu n'ait fait l'objet d'une vérification par un traducteur agréé», soutient-il.

Il cite l'exemple du communiqué de presse émis par le porte-parole de Mitsubishi Heavy Industries America à la suite de l'écrasement de l'avion MU-2 aux Îles-de-la-Madeleine, le 28 mars dernier. Voulant bien faire, Mitsubishi a utilisé un outil de traduction automatique pour communiquer ses condoléances en français aux proches et amis de Jean Lapierre et de ses parents décédés. Le communiqué était truffé d'erreurs du début à la fin. Voici quelques exemples qui se trouvaient au commencement du communiqué original : «Il y a des rapports initiaux qu'il faisait mauvais au temps de l'accident, mais nous ne savons plus à ce moment... Inspecteurs de Mitsubishi se réunissent toutes les informations qu'ils peuvent...»

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