Au Québec, cette approche est balbutiante. Le film À5000km de Jérome, réalisé et coproduit par Thierry Vogler, a tenté sans succès de se financer entièrement grâce au Web. Le coproducteur Zénon Olejniczak s'est finalement tourné vers le modèle traditionnel : il a déposé une demande auprès des organismes publics traditionnels.
À la Société de développement des entreprises culturelles (SODEC), la directrice des communications Marie-Hélène Paradis admet que le gouvernement n'a pas pleinement évalué le potentiel du financement de films par Internet. L'organisme a amorcé une longue série de consultations sous le thème " Option culture, virage numérique ", dans le but de mettre en branle l'été prochain une stratégie pour mieux exploiter le potentiel du numérique dans la culture.
Des clics en or
Le réalisateur Patrick Boivin, lui, ne demande pas directement aux internautes de financer ses productions, mais c'est tout de même du Web qu'il tire une partie de ses revenus, sous forme de redevances publicitaires sur YouTube. " Cette plateforme m'apporte deux choses : de l'argent et des contacts ", confie ce passionné qui réalise principalement des courts métrages d'animation qu'il fait chez lui. Patrick Boivin est si populaire sur le site de partage de vidéos que YouTube en a fait un partenaire. Ainsi, le réalisateur reçoit une partie des recettes générées par les publicités accolées à ses films. Ses vidéos ont été vues plus de 82 millions de fois. Sans dévoiler de chiffres, il affirme que le partenariat lui permet de toucher " des milliers de dollars " par mois.
Pour lui, YouTube, c'est plus que de l'argent sonnant. Le rayonnement de son talent comme cinéaste d'animation a capté l'attention de Google, d'Iggy Pop, d'Indochine et du planchiste Tony Hawk. Des gros noms pour qui il a réalisé des vidéoclips et des pubs. " Cela m'a ouvert tout un réseau à Hollywood, mon nom circule pour des longs métrages. C'est quelque chose que je n'aurais jamais envisagé avant. "
Le Web ne saurait financer n'importe quelle production. " Le fractionnement des sources, ça amène plus de souplesse. Un projet peut trouver la voie qui lui convient le mieux. Par contre, tous les projets ne sont pas bons pour le Web ", souligne Véronique Marino, de l'INIS.
M. Boivin acquiesce : " Un film de science-fiction avec des monstres, c'est sûr que c'est populaire sur le Web. " Par contre, ça ne convient pas à tous les scénarios. En ce moment, il réalise un film, " une histoire d'amour ". Le projet est financé en partie par les revenus issus des projets YouTube et grâce à une aide financière de 60 000 $ du Conseil des arts du Canada. " Si je devais demander aux internautes de financer ce film, je pense que je ramasserais des peanuts ! "