Dick Evans croit qu'un bon dirigeant doit être passionné par autre chose que son entreprise. Autrement, cela peut devenir dangereux.
" Il risque d'être intoxiqué par son entreprise. C'est probablement ce qui s'est produit lors de la crise des [prêts hypothécaires à haut risque] ", avance-t-il lors de notre entrevue.
C'est pourquoi, dit-il, la pratique de l'art ou d'une autre passion que celle des affaires apporte l'équilibre et la sagesse nécessaires à la bonne gestion. " Pour moi, la photographie a été une façon de rester branché sur le monde, de prendre du recul et, par conséquent, de prendre des décisions d'affaires plus éclairées, explique-t-il. Il m'est arrivé de trouver la solution à un problème seulement après une séance de photo. "
L'ex-numéro 1 d'Alcan affirme que plusieurs grands dirigeants d'entreprise ont des passions qu'ils ne partagent pas avec les médias, soit parce qu'on ne s'intéresse pas à cette facette d'eux, soit parce qu'ils ont peur d'être jugés.
Cela a notamment été le cas de l'ancien président de BP, Tony Heyward, qui a voulu participer à une régate de voile pendant que le pétrole fuyait de la plateforme Deepwater Horizon, dans le golfe du Mexique. " Il en avait besoin, de cette régate. "
" Le langage déshydraté des affaires "
Le jour de notre entrevue, M. Evans a fait la rencontre de Nancy J. Adler, une professeure de l'Université McGill qui est à la fois artiste peintre et docteure en management.
Sommité mondiale dans le domaine de l'alliance art et leadership, elle inaugurait, dans une galerie du Vieux-Montréal, une exposition intitulée " Pour en finir avec le langage déshydraté des affaires ", commanditée par la Banque TD. Nancy Adler apprend aux étudiants en gestion à recourir davantage à des processus artistiques pour améliorer leur prise de décision et faire d'eux des leaders plus engageants, plus humains.
Dans le cadre de ce cours, elle fait venir des artistes, notamment un chef d'orchestre et un champion d'improvisation, pour qu'ils témoignent de leurs méthodes de travail.
" Il ne se s'agit pas de faire des artistes de mes étudiants, mais de leur inculquer le langage des arts et ses processus. À l'instar de l'artiste, un bon leader ne se contente pas de choisir entre A ou B, il crée quelque chose de nouveau. Il recherche la beauté et suscite l'espoir. C'est ce dont nous avons besoin et qu'on ne nous a pas enseigné dans les écoles de gestion. "