La recherche sur le génome, un outil de plus pour lutter contre le réchauffement planétaire

Offert par Les Affaires


Édition du 21 Novembre 2015

La recherche sur le génome, un outil de plus pour lutter contre le réchauffement planétaire

Offert par Les Affaires


Édition du 21 Novembre 2015

«Tous les terrains contaminés des villes sont des îlots de chaleur qui peuvent être évités. » – Catalina Lopez-Correa, v.-p., affaires scientifiques, de Génome Québec.

«La génomique est sortie du laboratoire», dit Catalina Lopez-Correa, vice-présidente, affaires scientifiques, de Génome Québec. En effet, le séquençage de l'ADN de champignons, de plantes, de microbes ou de bactéries, mené par ses chercheurs, a récemment débouché sur des applications concrètes, voire des technologies utiles dans la lutte contre les changements climatiques et dans l'adaptation à ceux-ci.

Adrian Tsang, professeur à l'Université Concordia, a entamé les démarches pour créer une entreprise. À partir de ses découvertes récentes, il proposera éventuellement des services-conseils sur les combinaisons d'enzymes de champignons, qui désagrègent en sucre la biomasse ligneuse comme le bois, les feuilles mortes, la paille et le fourrage. Si cette expertise peut sembler abstraite de prime abord, ses découvertes produisent des effets tangibles et présentent un intérêt certain pour les entreprises dans le secteur de l'énergie.

En effet, un «cocktail» de ces enzymes peut servir à la création d'un biocarburant de deuxième génération, qui n'aggraverait pas la faim dans le monde comme le faisait le bioéthanol à base de maïs. M. Tsang affirme que l'énergie qui découle de cette combinaison d'enzymes est plus verte, notamment parce que la ressource est renouvelable. Cette technologie est issue de l'étude de l'ADN des champignons.

M. Tsang travaille aussi, dans la foulée, à mettre au point des suppléments d'enzymes pour la nourriture des porcs et des poulets, afin de faciliter la digestion chez ces animaux et de réduire les émissions de méthane produites par leurs excréments et leurs éructations. Les émissions de méthane ont un potentiel de réchauffement 21 fois supérieur à celui du gaz carbonique (CO2).

Investissements de 750 M$

Ces innovations prennent pour point de départ la recherche fondamentale. Les activités de Génome Québec, amorcées en 2000, ont suscité en 15 ans près de 750 millions de dollars d'investissement et mobilisé 800 chercheurs dans 90 projets de recherche scientifique. Au départ, les travaux en génomique s'attardaient essentiellement à la santé humaine ; aujourd'hui, les avancées dans d'autres domaines portent leurs fruits.

«L'intégration et l'application de la génomique dans le système de santé prend beaucoup de temps, et pas seulement au Québec, tandis que les applications et les solutions qu'apportent la génomique dans d'autres secteurs, comme dans ceux des changements climatiques, de la foresterie et de l'agriculture, se font beaucoup plus rapidement, parce qu'il y a moins de régulation», dit Mme Lopez-Correa.

Nouveau savoir-faire pour décontaminer les sols

Les recherches en génomique ont déjà prouvé leur pertinence dans le domaine de la décontamination des sols. Le projet scientifique GenoRem, soutenu par Génome Québec et Génome Canada, a permis de développer une solide expertise en matière de biorémédiation.

Les travaux de Mohamed Hijri et de Michel Labrecque, tous deux chercheurs à l'Institut de recherche en biologie végétale de l'Université de Montréal, se penchent sur le potentiel des champignons, mais aussi des plantes, des microorganismes et des bactéries, pour développer des techniques vertes de décontamination sur des terrains «modérément» pollués. Ces techniques sont mises à contribution pour dégrader des huiles présentes dans certains sols.

C'est le séquençage du génome de certains microbes qui a permis aux chercheurs de déterminer les combinaisons les plus efficaces de bactéries, de plantes et de champignons à mettre en interaction pour réhabiliter des terrains. L'objectif ultime consiste à dépolluer d'anciens sites industriels pour en faire des jardins communautaires ou des parcs. Certains projets ont été menés en ce sens à Montréal, Drummondville et Varennes. De 2010 à 2015, 11% des investissements de Génome Québec ont été consacrés à des travaux liés à l'environnement.

Mme Lopez-Correa voit dans cette démarche un outil de plus pour affronter les changements climatiques. «Tous les terrains contaminés des villes sont des îlots de chaleur qui peuvent être évités», dit-elle. De plus, outre leur objectif de «soigner la terre», les nouveaux espaces verts créés grâce à la biorémédiation génèrent, avec la présence de plantes, des capteurs de carbone «qui aideront à combattre, à soigner et même à prévenir les conséquences des changements climatiques».

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