"Il a tout pour réussir, estime l'ancien président de Cognicase, Ronald Brisebois, aujourd'hui à la tête d'Isacsoft. C'est un leader de compétences, une rareté en technologie. Il s'agit d'un expert en informatique, prêt à partager son savoir, à transmettre ses compétences. Et c'est pour ça qu'on le suit. En fait, c'est parce qu'il connaît qu'il dirige, et non parce que c'est lui le boss."
Ses compétences d'informaticien, Bruno Cloutier les cultive pour être toujours prêt à s'engager dans un projet d'envergure et à rassurer un client nerveux. Mais pour gérer Momentum Technologies, il lui a fallu être plus qu'un crack de l'informatique. Il a dû devenir spécialiste des accommodements raisonnables. Être ouvert, tendre l'oreille, s'ajuster, et ce tous les jours. Savoir affirmer ses valeurs et ses limites. Dans ses bureaux par exemple, on tolère le hidjab, mais pas la burqa. Un travailleur veut quatre semaines de vacances d'été pour rentrer dans son pays d'origine ? On le lui permet, mais il doit s'entendre avec le client et prévoir une relève à l'interne. Un autre observe le ramadan en travaillant ? On respecte son choix, mais il doit performer les services habituels. Des employés veulent de la viande casher au barbecue estival ? D'accord, mais puisque c'est plus compliqué, ils font eux-mêmes les achats, à même le budget fourni par l'entreprise.
"Le maître-mot est la flexibilité de l'employeur, estime Bruno Cloutier. Cependant, on a choisi de ne pas établir de règles selon les groupes ethniques ou religieux. C'est-à-dire qu'on ne fait pas de faveurs en fonction des groupes. On est souples et ouverts, mais la personne qui embarque dans notre aventure doit collaborer."
Une fois, un employé arabe a refusé d'aller chez un client assureur. Selon ses croyances, un assureur joue à Dieu, donc il n'avait pas le droit de travailler pour lui.
"On a eu un choc. On a parlé avec d'autres employés de sa nationalité pour savoir si c'était culturel ou personnel. L'ouverture et la communication ont porté leurs fruits. Ça s'est terminé en bons termes, on lui a fait comprendre qu'il n'était pas à sa place dans une firme de consultation", raconte le PDG de Momentum. Du même souffle, il précise qu'il s'agissait d'un rare échec dans une aventure multiculturelle qu'il aimerait voir imitée par plus d'entrepreneurs au Québec.
"Si je compare cela aux insuccès vécus auprès de Québécois, il n'y a pas de différence. Dans les bulletins de nouvelles, les immigrants sont associés à la mafia, au terrorisme, aux gangs de rue. Les belles histoires sont moins racontées, mais elles existent."