La main-d'oeuvre reste un défi pour les détaillants


Édition du 22 Mai 2024

La main-d'oeuvre reste un défi pour les détaillants


Édition du 22 Mai 2024

À l’automne 2022, les dirigeants de La Vie en rose ont décidé de se joindre à une mission du gouvernement du Québec au Maroc pour y recruter des employés. « Nous avons affiché huit types de postes et nous avons reçu des milliers de curriculum vitæ », raconte la vice-présidente aux ressources humaines, Lyne Raymond. (Photo: courtoisie)

COMMERCE DE DÉTAIL. Plus d’un poste vacant sur dix au Québec se retrouve dans le secteur du commerce de détail. Malgré une embellie depuis quelques mois, le recrutement et la rétention de la main-d’œuvre demeurent donc des défis de taille.

« Souvent, les jeunes travailleurs nous voient comme un passage en attendant d’arriver à leur “vrai” emploi, et ne pensent pas à faire carrière avec nous », explique Émilie Pelletier, directrice des ressources humaines pour l’Amérique du Nord de Décathlon.

Les jeunes employés ne connaissent pas bien les occasions qui s’offrent à eux chez ces détaillants, au-delà des postes en magasin. Résultats, des jeunes qui étudient en marketing, en design, en gestion, etc. vont ailleurs. « Décathlon a donc mis sur pied le programme “Vis ma vie”, qui permet à un salarié d’expérimenter pendant un jour ou deux un poste qui l’intéresse », révèle Émilie Pelletier.

L’entreprise s’efforce aussi de rendre l’expérience de travail conviviale et flexible. Tous les employés, des temps partiels aux directeurs, reçoivent des formations de savoir-être pour que tout le monde se sente bien. Ceux qui peuvent faire du télétravail ont le loisir de travailler dans un pays étranger pendant six semaines par année.

Le détaillant prête également de l’équipement et offre aussi un bonus aux salariés qui utilisent le transport actif, comme le vélo, pour se rendre au travail.

 

Haut taux de roulement

La situation de la main-d’œuvre s’est améliorée depuis la pandémie. Le nombre de postes vacants est passé de 32 000 en 2022 à un peu plus de 16 000 à la fin de 2023, selon l’Institut de la statistique du Québec. « C’est quand même énorme, relativise Manuel Champagne, directeur général de Détail Québec. De plus, environ 75 % d’entre eux sont des postes de première ligne, comme caissier, commis en magasin ou préposé au service à la clientèle. »

Manuel Champagne soutient que les commerces de détail rencontrent des défis sur le plan de l’attractivité, mais aussi de la rétention. « Le taux de roulement moyen dans ce secteur est de 26 %, mais de 40 % pour les emplois dans la vente et de 70 % dans la livraison », souligne-t-il.

Pour surmonter la rareté de la main-d’œuvre, les entreprises s’ouvrent à des bassins de travailleurs autrefois sous-utilisés, comme les immigrants, les personnes en situation de handicap ou les individus qui ont un passé criminalisé.

« Elles tentent en outre de proposer des salaires fixes plus élevés afin que les revenus dépendent moins de rémunérations variables, comme les commissions », ajoute Manuel Champagne.

 

Recruter à l’étranger

Certains détaillants se tournent par ailleurs vers l’étranger pour recruter du personnel.

La Vie en rose arrive relativement bien à pourvoir ses postes au siège social et à son centre de distribution. Mais elle vit plus de difficultés en magasin. Le taux de roulement reste élevé et les jeunes acceptent moins qu’avant de travailler le soir et la fin de semaine. À l’automne 2022, ses dirigeants ont décidé de se joindre à une mission du gouvernement du Québec au Maroc pour y recruter des employés.

« Nous avons affiché huit types de postes et nous avons reçu des milliers de curriculum vitæ », raconte la vice-présidente aux ressources humaines, Lyne Raymond. L’entreprise avait planifié de réaliser 90 entrevues sur place en février 2023, mais elle en a plutôt effectué 140. Finalement, elle a embauché 39 personnes, en vaste majorité des femmes.

Si elle a donné de bons résultats, l’aventure n’a tout de même pas été de tout repos. En plus du déplacement au Maroc, l’entreprise a dû entreprendre des démarches pour aider ces employées à se loger au Québec et faciliter leur intégration, notamment avec l’appui d’organismes, comme Reloc Québec. Elle a attribué un parrain ou une marraine à chaque nouvelle arrivante afin de leur faire visiter leur quartier, de les aider à faire l’épicerie, etc.

La démarche coûte cher aussi : de 9000 $ à 10 000 $ par personne embauchée. Sans compter les délais pour obtenir les permis. Les nouvelles travailleuses ont commencé à arriver environ un an après la mission au Maroc. Malgré tout, l’expérience a été concluante, soutient Lyne Raymond.

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