Le textile joue un rôle majeur dans l'économie indienne. Photo : Bloomberg.
BLOGUE. La réponse est sans équivoque : OUI ! À moins, bien entendu, que vous ne soyez un leader qui met la pagaille autour de lui, plus qu’autre chose…
Comment puis-je être aussi catégorique? Parce que j’ai trouvé, je crois, la réponse… en Inde. Ou plus exactement, dans une étude de chercheurs en Économie de la Stanford University, à Palo Alto, en Californie, laquelle s’est intéressée à l’impact réel des gestionnaires sur les activités de différentes entreprises indiennes, et est arrivée à la conclusion que le management compte vraiment.
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Ainsi, Nicholas Bloom, John Roberts, Aprajit Mahajan, tous trois de Stanford, ainsi que Benn Eifert, de Berkeley, et David McKenzie, de la Banque mondiale, ont choisi de mener leur étude en Inde, notamment parce que celle-ci est réputée pour ses entreprises «mal gérées», en tous cas du point de vue occidental du terme. C’est du moins ce qui ressortait d’une autre étude, signée en 2010 par Bloom et Van Reenen, qui comparaissait les pratiques managériales entre les États-Unis et l’Inde…
Les chercheurs ont contacté plusieurs dizaines d’entreprises indiennes de toutes tailles spécialisées dans le textile. Pourquoi cette industrie? Parce qu’elle est l’une des plus importantes du pays, représentant à elle seule 22% des emplois. Et ils ont proposé à leurs dirigeants de leur offrir gratuitement, cinq mois durant, les conseils et les services d’experts provenant d’un grand cabinet de conseil en management, dont l’identité n’a pas été divulguée.
Les consultants sont intervenus en trois étapes : le diagnostic, l’implantation de nouvelles méthodes de gestion et l’évaluation des résultats obtenus. Ils ont ainsi identifié une quarantaine pratiques managériales qui manquaient généralement à ces entreprises, comme un programme de maintenance régulière des machines, la mise en place de contrôles de qualité, un système d’incitatifs au travail pour les employés et les gestionnaires, ou encore une procédure pour établir le juste prix des produits fabriqués. Ils ont recommandé leur application, tout en donnant un suivi, au besoin.
Résultat : ceux qui ont suivi les conseils des consultants ont vu leur productivité bondir d’un coup de 11%. Ce n’est pas tout. La prise de décisions s’est davantage décentralisée, nombre de dirigeants réalisant qu’ils pouvaient très bien déléguer certaines tâches sans pour autant perdre le contrôle des activités de l’entreprise. Enfin, ceux qui ont découvert tout ce que l’on pouvait faire avec l’informatique en sont vite devenus accros. D’où la conclusion des chercheurs : «Management does matter».
Le hic? Les dirigeants eux-mêmes!
Cela étant, on peut s’étonner que le gain en productivité n’ait été que de 11%, après tant d’efforts. Les photos des locaux des fabriques de textiles prises par les consultants avant leur intervention montrent qu’il était pourtant aisé d’obtenir davantage de progrès : sols jonchés de rebuts, passages bloqués par du matériel, machines encrassées, stocks empilés n’importe comment et n’importe où, etc.