Par la suite, les chercheurs ont regardé comment chaque membre avait voté lors d’un vote sensible et surtout comment les pairs qui avaient un lien social fort avec lui avaient, eux aussi, exprimé leur voix, alors que le vote n’était pas sensible pour eux. Et là, surprise! Une très forte corrélation entre l’orientation du vote de l’un et celle de ses «amis». Intrigués, Cohen et Malloy ont creusé un peu plus leurs données, et ont fini par mettre au jour le fait que tous les liens sociaux invisibles ne jouaient pas avec la même intensité. Ainsi, le lien le plus fort est celui de l’université, car il est capable de dépasser les clivages traditionnels : des membres de partis différents, mais de même université, sont capables de voter dans le même sens, lorsque cela compte vraiment pour celui pour qui le vote est «sensible»!
Un autre lien invisible joue sans qu’on s’en aperçoive. Il s’agit de l’emplacement des sièges : un membre du Congrès est clairement influencé dans son vote si, tout autour de lui, les autres votent dans un sens très précis. Une sorte de pression sociale pèse alors sur lui, et il lui est très difficile de s’en extraire. En conséquence, un membre charismatique peut avoir une influence considérable lors de votes sensibles, rien qu’en jouant de son aura sur ses voisins immédiats… Bien entendu, on ne parle pas ici de consignes de vote, mais bel et bien de moments où chacun doit s’exprimer en son nom sur un sujet délicat.
On le voit tout de suite, les implications de ces découvertes sont majeures en matière de management. Celles-ci nous apprennent qu’il y a bel et bien des réseaux invisibles qui oeuvrent au sein de toute équipe ou entreprise, et qu’on peut se retrouver en danger si l’on n’en tient pas compte. D’où l’intérêt de s’informer avec précision sur les uns et les autres - de connaître leurs goûts, leurs affinités et autres CV -, histoire de découvrir ces fameux liens qui échappent au premier venu.