«Les suggestions que les employés jugent à propos sont rédigées, signées et déposées dans cette boîte à mesure qu'elles leur viennent. À noter que lorsque nous disons 'employé', cela ne signifie pas seulement les manoeuvres, il y a aussi les contremaîtres, les chefs de département, les surintendants, en un mot, tout le personnel.
«Il est impossible de nommer toutes les idées qui peuvent être tamisées au moyen de la boîte aux suggestions. Tel suggérera un moyen tendant à améliorer le rendement, tel autre un procédé de manipulation plus économique, celui-ci une simplification susceptible de diminuer les dépenses inévitables (overhead), celui-là une méthode qui rendra plus efficient le travail de bureau, simplifiera la comptabilité, éliminera des livres inutiles ou une opération compliquée et inefficace. C'est qu'il y a tant de choses à améliorer dans l'organisation qui semble pourtant la plus parfaite...
«Il va de soi que toutes ces suggestions ne pourront être réalisées. Elles ne pourront même pas l'être immédiatement - celles qui mériteront l'attention - mais, pour l'employeur qui considère son entreprise non pas comme le rêve de sa vie mais comme une entité vouée à rendre service à ses semblables, ces suggestions seront une mine quasi inépuisable de perfectionnements.
«Outre le fait de stimuler l'ambition des employés qui se considéreront flattés de pouvoir donner des conseils au patron, cette pratique excitera chez eux le travail mental, aiguisera leur esprit de recherche, leur fera prendre intérêt à l'entreprise par le seul fait qu'ils s'apercevront qu'ils y ont leur mot à dire indirectement.
«C'est aussi un moyen pour le patron de connaître les employés qui prennent réellement intérêt à leur travail. Au moyen de ces suggestions, il pourra voir quels sont ceux de ses hommes qui sont les plus intelligents, les plus pratiques, les plus entreprenants. Il pourra choisir parmi les plus débrouillards. Et faire des plus actifs des associés, des surintendants, des contremaîtres. Il sera alors sûr d'avoir avec lui des hommes de valeur, qui ne travaillent pas seulement pour le salaire.
«De leur côté, les employés constateront bien vite que ce n'est pas le favoritisme qui gouverne les promotions, mais la réelle valeur des hommes. Si bien qu'ils redoubleront d'efforts pour obtenir de l'avancement, et ce, par le seul moyen rationnel en l'occurrence : en mettant en évidence leur valeur, leurs capacités, leur initiative.
«Bref, dans les moments de changements, il est bon d'avoir beaucoup d'idées à sa disposition, et ceci est un excellent moyen d'en trouver.»