Le ministre des Affaires municipales menace de couper les vivres à Laval et Longueuil si elles n'absorbent pas sans hausse de taxe la pelletée de compressions que Québec vient de leur envoyer. Pierre Moreau donne l'impression de raisonner avec simplicité et s'approche dangereusement de l'abus de pouvoir.
Monsieur Moreau estime que les villes prennent les contribuables pour des crétins parce qu'elles haussent les taxes plutôt que de compresser un peu plus leurs dépenses ou d'utiliser une partie de leurs surplus pour absorber la baisse de transferts.
Il accuse les maires Caroline Saint-Hilaire (Longueuil) et Marc Demers (Laval) de ne pas absorber les transferts uniquement parce qu'ils sont souverainistes.
C'est à première vue assez simpliste.
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Laval et Longueuil ont des surplus respectifs de 117,5 M$ et de 17,5 M$. Le compte de taxes de Longueuil augmente de 3,9% et celui de Laval de 3,2%. Ce sont des hausses élevées. S'il était si aisé pour les administrations municipales d'utiliser les surplus, il y a une forte présomption que ceux-ci auraient été utilisés pour diminuer la hausse du compte de taxe. Quel politicien, de quelque allégeance soit-il, aime hausser les taxes plus que l'inflation? C'est par le fait même se priver de votes à la prochaine élection.
Laval a notamment réagi en journée en expliquant qu'elle comptait affecter ces surplus au financement de ses infrastructures, qui souffrent d'un important déficit de mise à niveau. C'est autant d'argent qu'elle n'aura pas à emprunter et d'intérêts qu'elle n'aura pas à payer dans l'avenir. La décision peut très bien se défendre.
Soyons bon joueur, s'il est sans munition sur la motivation de Longueuil et Laval (une hausse pour des motifs d'orientation politique), monsieur Moreau a peut-être quelques cartouches sur l'utilisation des surplus.
Dans une couple d'années, lorsque les dispositions de la nouvelle loi sur les régimes de retraite prendront effet, Laval et Longueuil pourraient bien recevoir une intéressante récupération monétaire qui leur donnera un peu de souffle financièrement.
Il sera cependant intéressant de voir si le ministre osera y faire allusion, lui qui, tout au long des derniers mois, s'est complu à dénaturer l'objectif de son projet de loi en le présentant comme étant uniquement destiné à assurer la pérennité des régimes de retraite. Ce projet de loi visait en fait à fournir une importante récupération d'argent à un certain nombre de municipalités, particulièrement à Montréal. À l'exception de la Ville de Québec, bien peu ont eu l'honnêteté de le reconnaître et aucune n'a encore voulu chiffrer publiquement la récupération à venir.
Il est douteux que monsieur Moreau fasse appel au motif. Lui qui accuse aujourd'hui les maires de biaiser la discussion avec démagogie serait alors forcé de reconnaître qu'ils ne font que lui emprunter sa propre recette…
Le premier ministre devrait le rappeler à l'ordre