Si Jean Coutu n'est pas à vendre, où s'en va-t-il?
Ce qui nous amène à l'autre grande question que se pose le marché. S'il ne veut pas se vendre à Metro, que fera Jean Coutu?
L'entreprise n'a plus aucune dette et détient pour 185 M$ de liquidités. À chaque année, elle génère maintenant 130 M$ de liquidités excédentaires, après le programme de rachat d'actions et le versement du dividende actuel. Et on ne parle pas de sa participation dans le capital de Rite-Aid, qui est actuellement évaluée à 190 M$.
Pour illustrer à quel point l'entreprise est une machine à imprimer de l'argent: son nouveau centre de distribution et siège social pourrait se payer en moins de deux ans, juste avec les entrées courantes. Et si on tient compte des 60 M$ qui pourraient être reçus de la vente de l'actuel centre de distribution, c'est en près d'un an.
Évidemment, tout le monde s'attend à ce que le dividende soit haussé (près de 40 M$ actuellement) et à ce que le programme de rachat d'actions augmente (près de 30 M$ présentement).
Ce n'est pas exclu. Mais on a senti mardi, et on sent depuis quelque temps déjà, que la direction et le conseil sont hésitants.
Pourquoi?
En fait, croit-on déceler, Jean Coutu pourrait bien être en train de jongler avec quelques idées d'acquisition.
Il y a quelques pharmacies indépendantes au Québec et au Nouveau-Brunswick qui pourraient bien être achetées un peu plus tard, lorsque les gouvernements provinciaux auront fini d'abaisser les prix des génériques et qu'il y aura moins de risque de surpayer. Ce n'est probablement toutefois pas l'élément central du plan de croissance.
Ces dernières années, Jean Coutu a en effet amorcé une diversification de ses activités. Il y a d'abord eu Pro Doc, ce manufacturier de médicaments génériques, qui est un véritable succès de croissance. Puis, plus récemment, il y a eu cet intérêt de 50% dans Medicus, un fabricant d'appareils orthopédiques et d'appareils de réhabilitation.
Monsieur Coutu est quelques fois revenu sur ce marché, qu'il voit se développer.
Il ne serait pas étonnant de voir l'entreprise aller de plus en plus vers des actifs manufacturiers en santé et se servir de sa plateforme de distribution pour leur donner du levier.
Jusqu'où étendre le réseau?
Il n'y a pas si longtemps, avant que Jean Coutu ne décide d'abaisser sa participation dans Rite Aid, on se demandait personnellement si le groupe ne pourrait pas être tenté d'utiliser le réseau américain comme une avenue d'expansion majeure pour Pro Doc.
L'avenue semble désormais fermée. Mais une autre pourrait s'ouvrir.
Il y a deux ans, un passage de la biographie de Jean Coutu avait étonné. « Nous avons beaucoup appris de cette expérience (aux États-Unis) et nous comptons bien demeurer vigilants afin qu'elle nous serve tout à la fois de tremplin et de balise lorsque de prochaines possibilités d'expansion en sol américain se présenteront à nous », écrivait-il.
-Est-il dans votre intention de retourner un jour aux États-Unis?, lui a-t-on demandé, mardi.
Il a d'abord déploré que chez nos voisins du sud la santé ne soit pas au service du citoyen, mais une industrie au service des gens d'affaires. Il a ajouté être favorable aux tentatives de Barack Obama d'implanter une assurance santé. Et puis ceci: « Peut-être que s'il réussit, on pourra penser à faire un retour aux États-Unis ».
Une autre illustration que Jean Coutu a vraiment l'intention de rester maître de sa destinée.
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