Cette doctrine condamnait toutes interventions des puissances européennes dans les affaires des Amériques, car Washington considérait le continent comme sa sphère d'influence.
Il faut toujours être prudent avec les comparaisons historiques. Mais il est difficile ne pas faire de parallèle avec la crise actuelle entre la Chine et les États-Unis, qui pose tout un défi à la paix régionale et mondiale.
Le hic, c'est que ni Pékin et ni Washington ne veut perdre la face ou céder du terrain.
La Chine peut-elle accepter le maintien de l'ordre géopolitique de l'après-guerre, alors qu'elle est devenue une puissance économique, politique et militaire?
Pour leur part, les États-Unis peuvent-ils accepter de quitter graduellement l'Asie-Pacifique, comme l'ont fait les puissances européennes dans les Amériques, au 19e et au début du 20e siècle?
Difficile de répondre positivement à ces deux questions, d'où la complexité de cette crise qui pourrait durer très longtemps.
Chose certaine, le statu quo est « probablement insoutenable », faisait récemment remarquer avec justesse le Financial Times de Londres.
Quel est le juste milieu?
Un ordre géopolitique à mi-chemin entre la Pax Americana et la Pax Sinica?
Et si Pékin et Washington ne veulent pas vraiment se faire la guerre (du moins pour l'instant), pourront-ils du reste l'éviter à long terme?
Historiquement, la montée d'une nouvelle puissance a provoqué la plupart du temps une guerre, car l'arrivée d'un nouveau joueur sur l'échiquier géopolitique entraîne une résistance des puissances dominatrices.
C'est ce qui s'est passé au 20e siècle, avec le déclenchement de la Première, mais surtout de la Deuxième Guerre mondiale, rappellent les historiens.
La montée en puissance de l'Allemagne et du Japon a provoqué un affrontement avec les puissances dominantes de l'époque, soit la France, le Royaume-Uni et les États-Unis.
La rare exception est la montée en puissance des États-Unis au 19e siècle et au début du 20e siècle.
Les puissances européennes l'ont acceptée parce que les États-Unis appartenaient à la même civilisation qu'elles (la civilisation occidentale) et que la nation américaine était aussi une démocratie.
Or, les spécialistes en relations internationales soulignent que les démocraties se font rarement la guerre, même s'il y a des exceptions comme la guerre anglo-américaine de 1812, qui a opposé les États-Unis à l'Empire britannique (incluant le Canada).
Quant à la Chine et aux États-Unis, ces deux pays appartiennent à deux civilisations différentes. De plus, la Chine communiste est un régime autoritaire, tandis que les États-Unis sont une démocratie.
Mais si les États-Unis et l'ex-URSS ont pu éviter de s'affronter directement durant la guerre froide, les États-Unis et la Chine peuvent aussi y arriver, font remarquer des analystes.
Une guerre sino-américaine n'est donc pas inévitable, mais le risque est réel.