Mais ce n’est pas ça le pire… J’ai un problème de conscience. J’aime la musique et les artistes qui la font. Non seulement ces services rétribuent chichement les créateurs, mais en se présentant comme des buffets à volonté, ils viennent banaliser leur oeuvre.
Au Canada, la Commission du droit d’auteur a fixé à 0,12 $ pour 1000 écoutes les redevances que doivent verser les services de streaming à la société Ré:Sonne, qui fait la gestion collective des droits d’auteur. Cela n'inclut pas la redevance versée à l'interprète, ni celle du compositeur. Il faut également savoir que la maison de disque se prend une part au passage. Spotify affirme retourner 70% des ses revenus aux artisans. Mais ça représente combien pour ceux qui font la musique?
Chez Dare to Care Records, un label indépendant qui compte parmi ses protégés des artistes comme Coeur de pirate, Marie-Jo Thériault, Malajube et Avec Pas d’casque, on n’hésite pas à comparer les services de streaming à une forme légalisée de Napster. «Les artistes n’y trouvent tout simplement pas leur compte. Ça ne se compare pas à l’achat par téléchargement, ni aux redevances versées par les stations de radio traditionnelles», affirme Roseline Rousseau-Gagnon, de l’étiquette indépendante.
Mais dans la foulée, elle reconnait que ses artistes n'ont pas vraiment le choix de distribuer leur matériel par l'intermédiaire des sites de streaming pour le faire rayonner. Le modèle d’affaires est en nette croissance alors qu’iTunes a vu ses ventes reculer pour la première fois l’année dernière. C'est d'ailleurs ce qui a motivé Apple à acheter Beats, qui en plus de fabriquer des écouteurs, exploite un service de streaming jugé prometteur.
Les artistes sont mieux rémunérés sur la vente physique de l’oeuvre (CD, vinyle) que sur la vente par téléchargement. Mais même cette dernière est nettement plus payante pour eux que la rémunération à l'écoute. C’est le cas particulièrement des groupes émergents et des artistes qui exploitent des créneaux moins populaires ou des marchés limités, comme le Québec. Ça n’a rien à voir avec Taylor Swift, qui bien qu’elle ait retiré avec fracas tout son catalogue de Spotify en novembre, peut tirer de juteux revenus des services de musique en flux continu. Les redevances deviennent intéressantes sur un nombre d’écoutes astronomique.
Le progrès trouvera toujours une solution pour satisfaire des clients de plus en plus exigeants. Mais le progrès ici est un jeu à somme nulle. Si j'économise des milliers de dollars, c'est forcément aux dépens de quelqu'un. C’est comme acheter des fringues fabriquées au Bangladesh ou du café cultivé sur des exploitations non équitables.
Je vais tout de même poursuivre mon expérience sur Spotify pendant au moins trois mois, je vous en redonnerai des nouvelles. Pendant ce temps, je vous promets que je vais continuer d’acheter des disques de mes artistes préférés, particulièrement les québécois. Vous pouvez en faire autant.
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