Ce que signifie le report du CSeries pour Bombardier

Publié le 17/11/2012 à 00:00, mis à jour le 15/11/2012 à 09:37

Ce que signifie le report du CSeries pour Bombardier

Publié le 17/11/2012 à 00:00, mis à jour le 15/11/2012 à 09:37

Ainsi, le premier vol du CSeries est reporté en juin 2013. Il n'y a pas matière à paniquer, mais il est souhaitable que la prochaine échéance ne soit pas ratée. Allons-y avec quelques interrogations en cascades.

Y a-t-il un risque que Bombardier manque d'argent à cause du délai ?

En début d'année, la direction avait indiqué que ses projets aéronautiques (CSeries et Learjet 85) coûteraient 2 G$ d'investissements en capital en 2012, et que cette somme serait déboursée à même ses flux de trésorerie (l'argent qui entre moins celui qui sort).

La direction a prévenu il y a quelques jours qu'il allait finalement rentrer pas mal moins d'argent en 2012 qu'elle ne l'anticipait initialement. Elle tablait sur 2 G$, il en rentrera 1,2 G$. C'est 800 M$ de moins qui doivent être épongés par l'encaisse. L'écart avec le pronostic est principalement attribuable au fait que l'on attendait des commandes d'avions (de toutes sortes) qui ne sont pas venues. Conséquence, moins de dépôts et de paiements d'étape ont été reçus.

Avec le report du premier vol, Bombardier s'attend pour 2013 à devoir encore injecter 2 G$ en dépenses en capital. Elle n'est malheureusement pas prête à donner un aperçu de ses flux de trésorerie pour l'an prochain (elle fera plutôt le point après les résultats de son quatrième trimestre).

Postulons donc hypothétiquement une année identique à celle qui se termine, avec 1,2 G$ de flux. C'est un manque à gagner de 800 M$ qui viendra diminuer les liquidités en 2013. La division Transport pourrait venir diminuer ce manque à gagner, mais, par prudence, on supposera qu'elle n'est qu'en situation d'équilibre.

Bombardier devrait avoir à la fin de 2012 pour près de 4,5 G$ de liquidités, selon sa direction. Ses conditions de crédit stipulent qu'elle doit en conserver pour 1,2 G$ à la fin de chaque trimestre. Les liquidités réelles sont donc de 3,3 G$. Également compris dans ce montant : des lignes de crédit non utilisées de 1,4 G$. Par prudence, on ne les comptera pas. Au cas où, en 2015, lors du renouvellement des lignes, les banques seraient hésitantes face à une situation aéronautique difficile. On est finalement à 1,9 G$.

On le voit, il y a assez d'espace pour accueillir les nouveaux 800 M$ de manque à gagner. Il n'y a donc pas de danger que Bombardier manque d'argent à cause du délai.

Quelles seraient les conséquences d'un nouveau retard ?

Question difficile.

Côté financier, l'entreprise, en raison de ses liquidités, semble même être en mesure de supporter un deuxième report. En postulant un déficit identique, on s'approcherait du niveau d'encaisse minimal à soutenir, mais avec encore 1,4 G$ de lignes de crédit disponibles.

En Bourse, le cours de l'action de Bombardier reculerait cependant significativement. On se rapprocherait en effet des premières dates de livraison (2014). Il y aurait probablement des pénalités qui s'exerceraient en raison des retards, si ce n'est pas des annulations de commandes. Et les investisseurs se mettraient à douter de l'accouchement et de la présence même d'un marché.

Ça ne devrait pas être l'hécatombe, parce que certains spéculeraient aussi que l'abandon du projet ramènerait plus de rentrées de fonds dans l'entreprise. Mais s'il y avait abandon du projet, sur une base concurrentielle - vis-à-vis Embraer notamment -, Bombardier aurait désormais un positionnement désavantageux qui se refléterait dans ses multiples et, à plus long terme, dans sa rentabilité.

Quelles seraient les conséquences d'un vol dans les temps (juin) ?

Si le marché aérien tient, un redressement senti du cours de l'action. Il y aurait encore plusieurs risques d'exécution, mais les investisseurs accorderaient plus de valeur à un avion qui vole qu'à un avion sur plan.

Si le marché aérien montre des signes de faiblesse, au moins le vol inaugural aiderait à stabiliser le titre.

Le marché tiendra-t-il ?

Une autre question très difficile.

On n'est pas très sûr. Maintenant que les élections américaines sont passées, il faudra s'attaquer au déficit, ce qui veut dire moins de stimulation économique, ce qui rime aussi avec ralentissement économique.

Il faut cependant reconnaître que, pour l'instant, les choses vont mieux qu'on ne l'aurait pensé. Au point où l'International Air Transport Association vient de faire passer son anticipation de bénéfices 2012 pour les sociétés aériennes de 3 à 4,1 G$ US. Et que pour 2013 son pronostic est de 7,5 G$.

En résumé

Un nouveau délai ferait tomber le titre. Dans l'état actuel des choses, un premier vol à temps lui redonnerait de l'altitude. Si on croit que le CSeries ne volera pas en juin, il vaut sans doute mieux sortir. Si l'on croit qu'il volera, les perspectives semblent plutôt bonnes, mais il faudra suivre de près les statistiques économiques au cours des prochains mois.

DANS LE DÉTAIL

Sur le radar

Le titre sur cinq ans

BOMBARDIER (BBD.B ; 3,37 $)

Données de marché

Symbole: BBD.B

Prix actuel: 3,37 $

Fourchette 52 sem.: 3,30 $ - 4,93 $

Dividende: 0,10 $

Valeur boursière: 5,9 G$

Prévisions de bén. par action ($ US)

ANNÉE / 2012 / 2013

30 juin / -0,43 $ / 0,50 $

T1 / 0,10 $ / 0,10$

T2 / 0,10 $ / 0,11 $

T3 / 0,12 $ / 0,12 $

T4 / 0,13 $ / 0,15 $

Recommandations des analystes

Achat 7

Surperforme 9

Conserver 6

Sous-performe 1

Vendre 0

Cible des analystes

Moyenne: 5,04 $

Plus élevée 6,80 $

Plus basse 3,41 $

Source : Thomson Reuters

blogue > www.lesaffaires.com/francois-pouliot

francois.pouliot@tc.tc

À la une

Bourse: records en clôture pour Nasdaq et S&P 500, Nvidia première capitalisation mondiale

Mis à jour le 18/06/2024 | lesaffaires.com, AFP et Presse canadienne

REVUE DES MARCHÉS. Les titres de l’énergie contribuent à faire grimper le TSX.

Stellantis rappelle près de 1,2 million de véhicules aux États-Unis et au Canada

Environ 126 500 véhicules au Canada sont concernés par le rappel.

Le régulateur bancaire fédéral maintient la réserve de stabilité intérieure à 3,5%

L’endettement des ménages reste une préoccupation pour le Bureau du surintendant des institutions financières.