Québec doit revoir son soutien à l'industrie du médicament

Publié le 11/02/2012 à 00:00

Québec doit revoir son soutien à l'industrie du médicament

Publié le 11/02/2012 à 00:00

Par Jean-Paul Gagné

C'est l'hécatombe. Après Merck (180 emplois de chercheurs éliminés à Kirkland), Pfizer (150 à Saint-Laurent), Sanofi-Aventis (100 à Laval), Johnson & Johnson (126 à Montréal), voilà qu'AstraZeneca (132 à Saint-Laurent) annonce à son tour la fermeture de son centre de recherche de Montréal.

Ces pertes d'emplois s'ajoutent à celles de plusieurs petites sociétés de biotechnologie, qui ont cessé leurs activités ou vendu le fruit de leurs recherches à des sociétés étrangères, faute de financement adéquat. On est en présence d'une tendance lourde.

À ces fermetures s'ajoutent d'autres pertes d'emplois : 340 à la suite de la fermeture prochaine de l'usine de médicaments génériques de Ratiopharm à Mirabel, 60 à l'usine de vaccins de GSK à Québec et 40 chez Theratechnologies à Saint-Laurent.

Le Québec possède un imposant bassin de chercheurs réputés dans le domaine de la santé, mais il est devancé par l'Ontario, où ont été réalisées 47 % des dépenses de R-D pharmaceutique au Canada en 2010, comparativement à 43 % au Québec. Le Québec subit un déclin, malgré les crédits d'impôt des gouvernements représentant 40 % des salaires des chercheurs, les congés d'impôt aux chercheurs étrangers et une protection de 15 ans pour les médicaments d'origine.

En vertu de cette dernière politique, le système public privilégie les médicaments d'origine aux génériques, si bien que les premiers représentent 66 % des ordonnances et 77 % des coûts des médicaments payés par l'État. Après cette période de 15 ans, Québec continue de rembourser les médicaments d'origine s'ils sont prescrits par les médecins ou s'ils sont exigés par les consommateurs. Dans les autres cas, l'État rembourse depuis le 1er avril 2011 plus de 2 100 médicaments génériques à des prix ne dépassant pas 30 % de ceux des médicaments d'origine équivalents. Ces prix baisseront à 25 % des prix des médicaments d'origine équivalents le 1er avril, soit le même taux que celui que paie l'Ontario. Grâce à cette politique, la prime du Régime d'assurance-médicaments est passée de 600 $ à 563 $ le 1er juillet 2011.

La «règle des 15 ans» a été mise en place pour encourager la recherche pharmaceutique. Elle a été instaurée en parallèle avec la protection accordée par le Canada pour 1 200 médicaments brevetés à la suite de l'engagement de l'industrie d'y dépenser 10 % de ses ventes de médicaments brevetés en R-D. Ce ratio a été respecté les premières années, mais il est passé de 11,7 % en 1995 à 6,9 % en 2010, selon le Conseil d'examen du prix des médicaments brevetés, un organisme créé par Ottawa pour fixer le prix maximum des médicaments brevetés vendus au Canada. Depuis 2006, ce prix devrait être établi à la médiane (7e rang) des médicaments vendus dans 13 pays. Or, selon le chercheur Marc-André Gagnon, de la Carleton University, le Canada se situe plutôt au 3e rang des pays où les médicaments sont les plus chers. Cet écart représente un coût de deux milliards de dollars (G $).

La «règle des 15 ans» a déjà été rentable pour le Québec, mais elle ne le serait plus. Selon une étude souvent citée, cette politique aurait coûté 25 millions de dollars (M $) au gouvernement en 2005, mais la R-D faite par l'industrie lui aurait rapporté 37 M $ en impôts et en taxes, d'où un gain de 12 M $. Or, selon des données du gouvernement, la «règle des 15 ans» lui coûtera 193 M $ en 2011-2012. L'étude de 2005 n'a pas été revue, mais il serait étonnant que cette politique soit de nouveau rentable.

Le vieux modèle est cassé

Le Québec est victime de la mondialisation de l'industrie pharmaceutique, qui se tourne davantage vers les pays émergents, où le marché des médicaments d'origine explose et où il y a de plus en plus de chercheurs et d'infrastructures de R-D. L'industrie considère aussi qu'il est devenu trop onéreux et trop risqué de dépenser 1 G $ pour développer un nouveau médicament, sans oublier les risques de poursuites en dommages, qui sont plus fréquentes et plus coûteuses.

Au lieu de rêver de blockbusters, les pharmaceutiques préfèrent maintenant acheter des sociétés de biotech et des fabricants de génériques, et conclure avec des tiers des partenariats de recherche sur des médicaments, mais aussi sur des outils de diagnostic.

Le fait que l'industrie délaisse le Québec pour sa R-D remet en cause le modèle de soutien actuel. On ne doit pas abandonner, mais une nouvelle approche s'impose. Il faut notamment une meilleure concertation de tous les intervenants dans ce secteur et miser sur les partenariats avec le privé.

MON COMMENTAIRE

J'aime

Le fait que personne ne s'est présenté contre Monique Leroux au terme de son premier mandat de quatre ans à la direction du Mouvement Desjardins indique que les dirigeants sont satisfaits de sa performance. Elle aura maintenant le champ libre pour mettre en place plusieurs plans d'action qui découleront des nombreux chantiers lancés ces dernières années sur plusieurs enjeux stratégiques et pour rendre plus concurrentiel le réseau des caisses Desjardins.

Je n'aime pas

Les dirigeants de la FTQ Construction boudent. Frustrés par la loi 33 qui a aboli le placement syndical dans leur industrie, ceux-ci boycottent le comité consultatif créé pour mettre en place la nouvelle loi et menacent de ne pas participer au système de référence des travailleurs que gérera la Commission de la construction du Québec (CCQ). C'est une autre tactique insensée de la FTQ Construction, comme le fut leur débrayage patenté et brutal lors du débat sur la loi 33. Si elle se prolongeait, leur obstination servirait la FTQ Construction même, puisque ses membres peuvent s'enregistrer eux-mêmes auprès de la CCQ. Ils comprendraient alors qu'ils n'ont plus besoin de leur syndicat pour travailler sur les chantiers.

jean-paul.gagne@tc.tc

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