Ottawa étouffe les aéroports canadiens

Publié le 04/12/2010 à 00:00

Ottawa étouffe les aéroports canadiens

Publié le 04/12/2010 à 00:00

Par Jean-Paul Gagné

Le président d'Air Canada, Calin Rovinescu, a récemment déclaré, lors d'une conférence organisée par Les Affaires, que sa société " économiserait environ un milliard de dollars " en loyer, redevances, droits de navigation et autres taxes directes et indirectes si elle était un transporteur américain.

Air Canada et les autres transporteurs aériens du pays subissent un désavantage concurrentiel énorme face aux sociétés américaines. Et, s'il en est ainsi, c'est parce que les gouvernements voient nos aéroports comme de simples infrastructures de transport et non comme des outils de création de valeur.

Alors que nos aéroports sont déjà peu concurrentiels sur la scène internationale (l'aéroport Pearson, de Toronto, aurait les droits d'atterrissage les plus élevés du monde), le fardeau financier et fiscal grandissant que leur imposent les gouvernements risque de les rendre encore moins attrayants pour les transporteurs aériens étrangers et les industries connexes. À défaut d'être corrigée, cette situation nuira à notre industrie du voyage et du tourisme qui, selon Jacobs Consultancy, a généré des revenus de 71,5 milliards de dollars (G $) en 2009, soit 2,2 % du produit intérieur brut du Canada, et a fourni 1,6 million d'emplois directs.

Les aéroports de Burlington et de Plattsburgh

Cela fait des années que nos aéroports se plaignent en vain de la concurrence inégale qu'ils doivent affronter. Il n'est donc pas étonnant que de plus en plus de Canadiens aillent prendre l'avion dans des aéroports américains situés le long de la frontière.

Pour leur part, les Québécois jettent leur dévolu sur les aéroports de Burlington et de Plattsburgh, où environ 600 000 et 60 000 Canadiens respectivement seraient allés en 2009, selon une enquête du Globe and Mail (27 novembre 2010). À lui seul, l'aéroport de Buffalo, situé au sud de la région la plus peuplée de l'Ontario, aurait accueilli 1,6 million (M) de Canadiens en 2009. Au total, 2,3 M de nos compatriotes auraient transité par 14 aéroports américains situés près de la frontière.

Le cas de l'ex-base militaire de Plattsburgh est révélateur. Pour atténuer l'impact de sa fermeture, le gouvernement américain y a construit une aérogare à des fins commerciales. " L'aéroport américain de Montréal ", comme il se décrit, n'a pas de dette et ne paie ni taxe ni loyer, ce qui lui permet d'offrir gratuitement le stationnement aux voyageurs.

En revanche, les aéroports de Montréal paieront cette année environ 28 M $ en taxes municipales et 29 M $ en loyer au gouvernement canadien. De plus, Aéroports de Montréal a une lourde dette, puisqu'elle doit financer les dettes accumulées de ses deux sites (Dorval et Mirabel) et le coût des immobilisations importantes réalisées à Dorval. De leur côté, parce qu'ils appartiennent à des municipalités, les aéroports américains financent leurs dettes avec des obligations dont les intérêts sont libres d'impôt.

Pire, parce qu'Ottawa possède les terrains qu'ils utilisent, nos aéroports lui ont payé des loyers de 2,9 G $ de 1999 à 2009, selon une formule basée sur la croissance de leurs revenus, ce qui est aberrant. Avec les impôts, les taxes et les droits qu'il perçoit, Ottawa a recueilli en 10 ans plus de 7 G $ de revenus de nos aéroports, alors qu'il a dépensé 4 G $ pour la sécurité aérienne et la promotion touristique, laissant ainsi un surplus de 3 G $. Résultat : le contexte financier et fiscal de nos aéroports est différent de celui des aéroports américains, ce qui les place dans un déséquilibre concurrentiel aussi inéquitable qu'intenable.

Si la tendance se maintient, Ottawa continuera d'exiger un loyer exorbitant aux aéroports, et les municipalités persistent à les taxer sur une base purement commerciale. Ceux-ci deviendront ainsi toujours moins concurrentiels face aux aéroports américains et aux grandes plaques tournantes internationales qui se développent à la grandeur de la planète et qui pourront, en raison de leurs économies d'échelle, accepter toujours plus de trafic passagers et de fret en transit.

Une stratégie plus intelligente consisterait à réduire le fardeau financier et fiscal de nos aéroports. Ceux-ci pourraient ainsi continuer d'investir dans leurs infrastructures, d'attirer plus de trafic et de services connexes, de créer des emplois et d'accroître les retombées économiques et fiscales de leurs activités.

Ainsi, au lieu d'être vus comme des vaches à lait, nos aéroports deviendraient de véritables pôles de développement économique.

J'AIME

Le premier ministre de l'Alberta, Ed Stelmach, tente de convaincre la Saskatchewan de créer une commission des valeurs mobilières conjointe pour bloquer le projet du fédéral de créer une autorité nationale en cette matière. Comme le Québec, le Manitoba s'oppose à cette centralisation. La Colombie-Britannique soutient le projet fédéral, mais le premier ministre qui succédera bientôt à Gordon Campbell pourrait changer cette position.

JE N'AIME PAS

Selon The Globe and Mail, les caisses de retraite des universités canadiennes accusent un déficit de solvabilité total de 2,6 milliards de dollars. Comme c'est le cas pour les sociétés privées, les universités de plusieurs provinces sont tenues de rembourser ces déficits, ce qui les oblige à réduire leurs dépenses ou à accroître les droits de scolarité. Les universités québécoises n'ayant pas cette obligation, elles laissent s'accumuler ces déficits.

jean-paul.gagne@transcontinental.ca

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