Les candidats libéraux prennent position

Publié le 02/02/2013 à 00:00

Les candidats libéraux prennent position

Publié le 02/02/2013 à 00:00

Alors que la course à la chefferie du Parti libéral du Québec bat son plein, nous avons rencontré les candidats Raymond Bachand, Philippe Couillard et Pierre Moreau pour connaître leurs positions sur les principaux enjeux socioéconomiques du Québec.

IMPÔT ET FINANCES PUBLIQUES

LES AFFAIRES - Est-ce que vous annuleriez la hausse d'impôt pour les plus riches ?

Pierre Moreau - Je ne l'annulerais pas du jour au lendemain, mais j'essaierais de la renverser le plus rapidement possible. Globalement, on paie trop d'impôt. Il faut essayer de contenir les dépenses et d'augmenter les revenus en exploitant les ressources naturelles, par une meilleure diplomation des jeunes et en soutenant le secteur manufacturier.

Philippe Couillard - On ne peut pas l'annuler tout d'un coup. Mais nous sommes arrivés au niveau maximum de tolérance. Ce sont des gens à l'origine de la création d'emplois et ils sont mobiles. Pour compenser, je veux introduire une vaste réforme de la fiscalité pour les particuliers et les entreprises afin d'accélérer la création de richesse.

Raymond Bachand - Je ne sais pas si le contexte économique le permettra, mais celle-là était vraiment de trop. Je ne suis pas dans les hausses d'impôt, mais davantage dans les baisses. Je baisserais notamment les taxes sur la masse salariale et les impôts des 62 ans ou plus qui restent au travail. Il faut pallier le manque de main-d'oeuvre et augmenter le PIB.

L.A. - Que pensez-vous du déficit actuariel des régimes de retraite publics ?

P.M. - L'État ne doit pas couvrir le déficit actuariel. C'est aux salariés de le faire. Ce serait inéquitable pour les contribuables. Il faudra augmenter leurs cotisations ou diminuer les bénéfices. Ça peut se faire en partie en relevant l'âge de la retraite. Il faut agir maintenant et amorcer la discussion avec les syndicats.

P.C. - Le déficit actuariel des régimes de retraite devrait être assumé par l'État et les employés. C'est classiquement l'approche. C'est une question de négociation avec les syndicats.

R.B. - Je veux protéger les régimes à prestations déterminées. Il ne faut pas créer un million de pauvres pour plus tard. Sur la question des contributions, je pense qu'il faut en venir à un équilibre 50-50 entre employeurs et salariés. Et sur les déficits actuariels, les nouveaux déficits devraient être épongés selon ce ratio entre l'État et ses salariés.

L.A. - Pourra-t-on maintenir le niveau des dépenses de santé à l'avenir ?

P.M. - Il va falloir travailler du côté de l'efficacité. Il faudra continuer à décloisonner les actes médicaux, en en demandant plus aux pharmaciens et aux superinfirmières. Je suis aussi assez d'accord avec une idée de Claude Castonguay [ex-ministre libéral] qui consisterait à financer les hôpitaux à l'acte plutôt qu'en accordant toujours une simple croissance de budget.

P.C. - Dans les années 1970, une étude annonçait la disparition des systèmes de santé vers 1985. Je crois à la poursuite du système, mais en modifiant la façon dont on paie les hôpitaux et les professionnels. L'OCDE s'oriente vers un financement à l'activité (acte). C'est ce qu'il faut faire, mais en tenant compte de la qualité. Il faut aussi valider le prix qu'on paie, pour une chirurgie par exemple, par rapport à des actes similaires posés dans le privé.

R.B. - On a ramené le niveau de croissance des dépenses de 6 à 5 %. Je pense qu'on peut réduire encore la pression. Ce sont les trois dernières années de vie qui coûtent cher. C'est 70 $ par jour à la maison comparativement à 1 000 $ par jour à l'hôpital. Il faudrait faire une migration vers le «vieillir chez-soi» en s'appuyant davantage sur les entreprises d'économie sociale.

UNIVERSITÉS ET DROITS DE SCOLARITÉ

L.A. - Les universités sont-elles sous-financées, et que feriez-vous des droits de scolarité ?

P.M. - Les universités sont sous-financées. La CREPUQ [Conférence des recteurs et des principaux des universités du Québec] évalue le sous-financement à 850 millions de dollars, l'économiste Pierre Fortin, à 350 M$. La vérité est probablement entre les deux. Les droits de scolarité devraient être augmentés. Ils devraient cependant l'être en fonction des coûts des programmes, et le système de remboursement devrait dépendre des perspectives de gains.

P.C. - Les universités sont sous-financées. Il reste à déterminer de combien. Une étude indépendante a été faite il y a deux ou trois ans et approuvée par le ministère des Finances. Il faudrait l'actualiser. La première hausse des droits était sur un horizon relativement court et créait un choc tarifaire. Je suis ouvert à une modulation prudente par discipline, en fonction du coût des programmes, et à un remboursement proportionnel aux revenus.

R.B. - Oui, les universités sont sous-financées. La question est de combien. On peut se chicaner sur 600 ou 800 M$. Il faut augmenter les droits de scolarité au-delà de l'indexation. Les étudiants universitaires bénéficient de leur scolarité plus que d'autres. Je pense que l'on pourrait moduler en augmentant davantage les droits de quatre facultés qui coûtent plus cher : médecine, chirurgie dentaire, pharmacie et médecine vétérinaire. Ces hausses viendraient diminuer celles des autres. J'imposerais aussi un vote secret aux étudiants.

PLAN NORD ET ÉNERGIE

L.A. - La formule de redevances minières est-elle adéquate ?

P.M. - Nous sommes au bon endroit. En 2007, nous étions derrière les autres provinces. Nous sommes maintenant en avant. On ne doit pas être loin de la limite de notre compétitivité.

P.C. - La formule a été ajustée adéquatement. Avec l'impôt, on est à 40 ou 41 % des profits. C'est le prélèvement combiné le plus élevé du Canada. On ne peut pas se comparer à l'Australie, où il y 800 mines, alors qu'on en a 20 et que les teneurs sont différentes. Il nous faut un cadre prévisible.

R.B. - Une société qui fait 100 $ de profit ici paie 41 $ à l'État. C'est 30 $ en Ontario. On va chercher le maximum possible. Il faut arrêter avec l'incertitude. Tous les nouveaux projets miniers au Québec sont suspendus.

L.A. - Doit-on exploiter le gaz de schiste ?

P.M. - Il ne faut pas l'exploiter dans des secteurs à risque pour les populations. À Gaspé, c'est un non-sens d'autoriser un forage, il y a une habitation à 300 mètres. Il faudrait instaurer un système où l'entreprise qui veut forer demanderait un permis. Le BAPE, ou un autre organisme, s'assurerait qu'il n'y a pas de risque pour la nappe phréatique ni pour la santé des gens. On aurait aussi un troisième critère qui serait l'acceptabilité sociale. Dans des zones trop près des agglomérations, ce serait interdit.

P.C. - Je suis opposé à des moratoires sans fin. L'exploitation doit cependant se faire dans le respect des communautés et de la sécurité. Les moyens technologiques s'améliorent, côté sécurité, et la Grande-Bretagne a relancé l'exploitation. Il y a sûrement des endroits où l'on peut faire des tests d'exploitation avec un encadrement scientifique en attendant que les prix remontent et soutiennent l'exploitation.

R.B. - L'une des raisons qui expliquent la croissance économique des États-Unis est l'exploitation du gaz de schiste. Cela dit, je n'en veux pas dans les endroits où ce serait risqué pour la nappe phréatique. Une évaluation environnementale est en cours. Là où on dira que c'est dangereux, ce sera non, sinon, ce sera oui.

L.A. - Doit-on exploiter le pétrole dans le golfe du Saint-Laurent ?

P.M. - Je suis en faveur. Il ne faut pas négliger le facteur sécurité, mais la Norvège fait de l'exploitation dans la mer du Nord, où les conditions d'exploitation sont au moins aussi difficiles qu'ici.

P.C. - Terre-Neuve a commencé à exploiter Old Harry. Il nous faudrait une entente avec elle et nous devrions aller consulter et rassurer la population des Îles-de-la-Madeleine sur la manière dont ça se fera.

R.B. - Sous réserve d'une évaluation environnementale, je suis pour. On pourrait créer une société conjointe avec Terre-Neuve, qui déterminerait les paramètres environnementaux, les critères d'appels d'offres pour l'exploitation, les redevances. Il y a une incertitude territoriale. À la limite, on nommera un arbitre pour le partage des redevances.

L.A. - Les projets électriques comptent pour 50 % des investissements prévus dans le Plan Nord. Est-ce illusoire, compte tenu des importants surplus d'électricité ?

P.M. - Les barrages ne devraient se faire que s'ils sont rentables. Nous avons d'importants surplus d'électricité, mais ils sont difficiles à prévoir. Je me demande si Hydro-Québec ne devrait pas tenter d'en exporter davantage vers les États-Unis. Et peut-être même vers l'Ontario.

P.C. - Dans le passé, on a interrompu le développement hydroélectrique sur de soi-disant surplus d'électricité, et il a ensuite fallu le reprendre de façon accélérée. La demande va augmenter ici, aux États-Unis et en Ontario, où ils déclassent le nucléaire. On peut aussi se servir des surplus pour attirer des entreprises.

R.B. - La planification des surplus et des déficits d'électricité n'est pas facile. Dans le Nord, [certains] des barrages coûtent trop cher aujourd'hui, notamment en raison du transport. Mais, si une mine importante doit s'installer là-haut (comme le projet Adriana), on peut peut-être construire et demander le plein tarif. Ça amortira une partie des coûts et, un jour, on pourra se raccorder.

DÉVELOPPEMENT DE QUÉBEC INC.

L.A. - Êtes-vous d'accord avec la mission de la Caisse de dépôt et placement ?

P.M. - La Caisse a une mission équilibrée. Elle doit continuer d'avoir une totale indépendance. Je suis satisfait de son mandat.

P.C. - Je suis favorable. D'abord le rendement, puis le développement économique du Québec. À valeur égale d'investissement, je suis pour qu'elle investisse au Québec ; mais j'insiste, à valeur égale.

R.B. - Je suis d'accord. La mission prévoit le rendement comme premier objectif tout en favorisant le développement économique du Québec. C'est l'argent des déposants. Si l'État veut intervenir, qu'il le fasse par Investissement Québec.

L.A. - Pour préserver les sièges sociaux du Québec, devrait-on adopter une législation comme celle du fédéral, qui stipule qu'une prise de contrôle doit être à «avantage net» ?

P.M. - Sur la question des sièges sociaux, je pense qu'en concert avec d'autres fonds privés il est parfois envisageable que le gouvernement, via Investissement Québec ou autrement, intervienne pour préserver un siège social. Ce serait un placement temporaire et conditionnel au fait que l'entreprise s'amende ensuite pour corriger ses faiblesses, car c'est souvent dans ces moments que cela survient. Je serais favorable à une intervention législative, mais vraiment en dernier recours. Et pas à partir d'une loi-cadre, mais par une loi spéciale. Il faut cependant être très prudent avec cela.

P.C. - Je ne suis pas en faveur d'une réglementation et suis réfractaire à des marchés qui ne sont pas totalement ouverts. Sauf pour nos sociétés de ressources. Et Ottawa s'en occupe pour l'instant. On pourrait cependant réfléchir à la possibilité d'accorder plus de pouvoirs aux conseils d'administration et de leur permettre de tenir compte de toutes les parties prenantes [employés, fournisseurs, milieu, etc.].

R.B. - On devrait donner plus de pouvoir aux conseils d'administration. Comme celui de ne pas transmettre une offre aux actionnaires s'ils jugent qu'elle n'est pas dans l'intérêt de la société. Il y a aussi des États où il est interdit de réaliser des synergies par attrition pendant un certain temps.

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