Pour redéfinir leur modèle commercial, les quotidiens réorganisent leur force de travail. Les vendeurs ne travaillent plus de façon cloisonnée, mais en équipes tactiques qui offrent aux annonceurs des solutions intégrées - lire multiplateformes - tandis qu'on demande aux journalistes et aux photographes d'élargir leur champ de compétences pour pouvoir travailler, eux aussi, sur plusieurs plateformes. Cela ne se fait pas sans heurts, surtout auprès des employés plus âgés, qui redoutent que la spécificité de leur métier se perde dans l'opération.
Bernard Asselin, vice-président, ventes et marketing, et directeur des services aux lecteurs de The Gazette, décrit la journée typique du nouveau travailleur de l'information : " Il arrive avec une nouvelle, il la publie sur le site Internet, avec une ou des photos, qu'il a prises lui-même si la qualité de la photo n'est pas jugée importante. Ensuite, il alimente son blogue. Plus tard, il ira à la radio ou à la télé et, en fin de journée, il terminera par une analyse plus approfondie de la nouvelle pour le journal du lendemain. "
Chose certaine, ajoute M. Asselin, " il n'est plus question d'envoyer quatre personnes couvrir la même conférence de presse du maire de Montréal ".
C'est clairement vers cette organisation du travail que tend le Journal de Montréal. Le quotidien, dont le propriétaire, Quebecor Media, possède des actifs en télévision, presse magazine, journaux, téléphonie, câblodistribution, etc., s'apprête à lancer son propre site Internet (en plus du site Canoë de la maison mère).
Plus facile pour les plus jeunes
Les patrons du Journal demandent au syndicat de leur laisser toute la latitude pour revoir les tâches, les postes, et même les services, signale le représentant syndical Raynald Leblanc.
Tant M. Leblanc que la Fédération nationale des communications, qui représente les syndiqués du Journal, craignent une diminution de la pluralité des sources d'information. " Je n'ai pas envie que la critique d'un disque dans le Journal de Montréal soit faite par celui qui travaille pour le site Internet d'Archambault [également propriété du groupe Quebecor] ", ajoute M. Leblanc.
Mais pour Isabelle Dessureault, de Quebecor, c'est un faux débat. " Le fait d'économiser sur certaines tâches va permettre d'en financer d'autres, comme des enquêtes plus poussées ", dit-elle.
Et aux employés qui ne pourront suivre la cadence, plusieurs quotidiens offrent des départs volontaires. Le changement risque d'être plus facilement endossé par la jeune génération de journalistes qui, " de toutes façons, est formée au multimédia dans les écoles de journalisme ", fait valoir David Gollob, de l'Association des journaux dcanadienne.
