L'IREC et la Caisse de dépôt : qui a la tête dans le sable ?

Publié le 25/02/2012 à 00:00

L'IREC et la Caisse de dépôt : qui a la tête dans le sable ?

Publié le 25/02/2012 à 00:00

«Quand on veut tuer son chien, on dit qu'il a la rage», raconte le vieux proverbe français. Au Québec, nous en avons fait une version bien de chez nous qui va ainsi : «Quand on veut noircir quelqu'un, on dit qu'il est associé aux sables bitumineux».

La plus récente salve a été tirée par l'Institut de recherche en économie contemporaine, l'IREC, qui vient de publier un document intitulé «Se sortir la tête du sable». Les deux auteurs, Éric Pineault et François L'Italien, tous deux du département de sociologie de l'UQAM, s'emploient à démontrer que les investissements de la Caisse de dépôt dans les sables bitumineux sont proportionnellement démesurés, et que la Caisse va ainsi à l'encontre des orientations du Québec dans la lutte contre les émissions de gaz à effet de serre.

En fait, ses placements dans les sociétés actives dans le nord de l'Alberta atteindraient 12,5 % de tout son portefeuille d'entreprises cotées en Bourse. À noter qu'un premier communiqué établissait cette proportion à 14 % ; une mise à jour publiée 24 heures plus tard en a réduit la hauteur.

Il s'agit au fond d'une charge politico-économique. On peut s'attarder au fond, même si la technique d'analyse laisse à désirer.

D'abord, les auteurs s'en prennent aux «politiques de placement dictées par les marchés financiers». En d'autres termes, la Caisse suivrait servilement les indices et autres barèmes de placement, alors qu'elle devrait plutôt aider à la «structuration de l'espace économique du Québec». Et on déplore dans un texte subséquent le «fétichisme du rendement».

Permettez-moi de rappeler ici que la Caisse s'est fait flageller, en 2009, après la publication d'un bilan désastreux qui montrait une perte de quelque 40 milliards de dollars. J'aimerais savoir si ses déposants, comme la Régie des rentes, sont tout aussi insouciants quant au rendement des sommes confiées à la Caisse. Ou encore, comme le Régime de retraite de l'Université du Québec, auquel contribuent les auteurs.

D'autant plus que l'approvisionnement en pétrole est un enjeu géopolitique toujours plus central et que les acteurs canadiens ont toutes les chances de s'y faire valoir. L'Alberta n'est pas l'Iran, et nous sommes chanceux.

Oui, à terme, il serait bien de pouvoir se passer de pétrole. Mais en France, ces jours-ci, la grande affaire demeure la quasi-faillite de Photowatt, productrice de panneaux solaires, qui comptait 430 employés et dans laquelle l'État avait investi massivement. Sa déroute rappelle celle de la californienne Solyndra, sur laquelle l'administration Obama avait beaucoup misé. Les énergies vertes vont finir par émerger, mais y investir demeure une aventure et on doit le savoir, à la Caisse.

D'autre part, des erreurs méthodologiques entachent la publication de l'IREQ. La plus manifeste consiste à ranger dans la catégorie «sables bitumineux» 100 % du placement dans les entreprises en cause. Suncor, par exemple, c'est aussi Petro-Canada et toutes les exploitations de pétrole conventionnel (comme Hibernia, au large de Terre-Neuve), sans compter les raffineries, le réseau de stations-service et même l'énergie éolienne, dont Suncor reste un producteur important, au Canada. Associer intégralement Suncor aux sables bitumineux ne sert à rien, sinon à gonfler les chiffres. Il en va de même pour Enbridge, à qui on reproche d'être appelée à jouer un rôle «déterminant» dans le secteur par son futur (et incertain) pipeline Gateway. L'accusation est prématurée, puisqu'on ne sait même pas s'il sera construit un jour !

On peut adresser toutes sortes de reproches à la Caisse, mais dans ce cas précis, ses dirigeants ne devraient pas perdre le sommeil.

Dans le temps, c'était permis ?

Dans un blogue précédent, je revenais sur une autre manchette récurrente au Québec, touchant cette fois la famille Desmarais et son domaine de Sagard. Il appert que ce qui est pourfendu aujourd'hui était permis hier... Voici le mot que nous a fait parvenir un commentateur : «Lorsque Pierre Péladeau est décédé, la famille a publié un touchant album souvenir [avec] plusieurs photos du célèbre [personnage] avec des hommes politiques, surtout lors des fameux pow-wow qui avaient lieu à sa résidence dans les Laurentides. On peut voir les Jacques Parizeau, Lucien Bouchard [et autres] se divertir aux frais du fondateur de Quebecor. Jamais ce type d'événement n'a posé [problème]».

DE MON BLOGUE

Quebecor

Qui croire ?

Le vice-président aux affaires juridiques de Quebecor, Marc Tremblay, déclare : «Nous vous confirmons qu'au sein de QMI, le respect de l'indépendance des salles de rédaction est un principe sacré...» Jean-Philippe Décarie écrit sur Rémi Marcoux, cofondateur de Transcontinental (éditeur des Affaires) : «Malgré mes 15 années comme chroniqueur financier au Journal de Montréal, je n'avais jamais eu la chance de lui parler, parce que mes patrons refusaient qu'on donne la parole à un concurrent.»

Vos réactions

«Quand on parle de monopole, il est plus souvent question de Quebecor, car c'est un véritable empire culturel et de désinformation : Le Journal de Montréal, Canoë, Archambault, Vidéotron, etc. [...] Même le journal Voir est maintenant boycotté par les magasins Archambault.»

- Olivier M.

«Ils devraient tous deux [Desmarais et Péladeau] laisser tomber leur antagonisme mutuel et oeuvrer pour le Québec, que ce soit à l'échelle nationale pour Quebecor ou à l'échelle internationale pour Power Corp.»

- dencour

rene.vezina@tc.tc

blogue > www.lesaffaires.com/rene-vezina

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