Il faut diminuer nos attentes démesurées envers l'État

Publié le 10/03/2012 à 00:00

Il faut diminuer nos attentes démesurées envers l'État

Publié le 10/03/2012 à 00:00

Par Jean-Paul Gagné

Le vérificateur général du Québec a fait de la dette du Québec le sujet principal de son dernier rapport. Ce choix indique que le niveau d'endettement du gouvernement québécois a atteint un niveau préoccupant.

Contrairement à ce que certains peuvent penser, ce message ne vise pas seulement nos élus. Au contraire, cette situation nous interpelle tous, car c'est à cause de nos attentes démesurées envers l'État que nous avons ce niveau d'endettement. Certes, les élus ont abusé des miroirs aux alouettes, et ce sont eux qui ont décidé d'offrir tel ou tel programme ou de faire tel ou tel investissement. Nous avons pourtant une grande part de responsabilité dans cet endettement dangereux.

Et, à preuve qu'il n'y a rien de nouveau sous le soleil, des dizaines de milliers d'étudiants sèchent actuellement leurs cours pour réclamer le gel ou même l'abolition des droits de scolarité, et ce, même s'ils paient déjà moins cher pour leur éducation que ne le font les étudiants du reste du Canada, même si le sous-financement de nos universités menace la qualité de l'éducation qu'ils y reçoivent et même si le gouvernement du Québec est celui qui dépense le plus pour ses universités par rapport à l'ensemble du Canada.

Et que dire de nos garderies à 7 $ par jour, de notre programme universel d'assurance médicaments et de notre régime d'assurance parentale, qui sont de très loin les plus généreux du Canada et que l'on finance en partie avec de la dette ? Jusqu'à la politique du déficit zéro instituée par le gouvernement de Lucien Bouchard, Québec a, pendant des décennies, emprunté pour payer des «dépenses dites d'épicerie», une pratique incompatible avec la saine gestion. On le fait de nouveau actuellement à cause du ralentissement économique, mais Québec promet le retour à l'équilibre en 2013-2014.

Il n'est pas impertinent ici de penser aux Grecs, qui, ayant eux aussi vécu au-dessus de leurs moyens, viennent de se faire imposer une forte baisse de leur niveau de vie par les prêteurs qui ont financé leur dette publique. Alors qu'ils blâment leur gouvernement et leurs prêteurs, les Grecs doivent aussi faire leur mea culpa pour leur indiscipline.

Certes, le Québec n'est pas dans la situation de la Grèce, mais le rythme de notre endettement a pris une vitesse de croisière inquiétante. Nous bénéficions pour le moment de taux d'intérêt très favorables, mais cela ne durera pas. Leur remontée fera exploser le coût du service de la dette.

Un rythme d'endettement jamais vu

Le Québec a augmenté sa dette de 10 milliards de dollars (G$) pendant l'exercice terminé le 31 mars 2011, après une hausse de 6 G$ l'année précédente, un rythme de croissance qui ne s'est jamais vu. Or, celle-ci gonflera d'un autre 10 G$ cette année et d'au moins 7 G$ l'an prochain.

Pire, notre dette brute déclarée, qui était de 173 G$ au 31 mars 2011 (soit 54,3 % du produit intérieur brut) ne comprend pas d'autres obligations et passifs du gouvernement.

Selon le vérificateur général, le gouvernement du Québec avait au 31 mars 2011 des obligations contractuelles s'élevant à 40,9 G$ (12,8 % du PIB) et des passifs environnementaux de 3,2 G$ (pour la restauration de sites pollués), lesquels ne sont pas comptabilisés dans sa dette brute officielle.

On retrouve dans ces obligations contractuelles des ententes pour l'acquisition éventuelle d'immobilisations, des promesses de prêts et d'investissements, des contrats de location-exploitation, des acquisitions d'immobilisations réalisées en partenariat public-privé, des financements de routes et d'hôpitaux et des emprunts faits pour des tiers (comme l'Agence métropolitaine de transport). On y retrouve aussi un prêt à une aluminerie, des passifs de fonds spéciaux (pour les garderies, l'assurance médicaments, le soutien aux proches aidants, les municipalités, etc.). N'y figurent pas non plus des déficits totalisant 5 G$ au titre de l'assurance automobile, de l'assurance stabilisation des revenus agricoles, de l'assurance parentale et de la santé et de la sécurité du travail.

Québec investit des milliards dans des infrastructures, des hôpitaux et d'autres équipements essentiels. Certes, ces immobilisations serviront aux générations futures et il est légitime de les financer par emprunt. Mais comme notre dette publique explose (sans compter notre part de 150 G$ de la dette fédérale), il est primordial de revoir des programmes existants, comme l'Ontario s'apprête à le faire, et de limiter au maximum les nouveaux engagements de dépenses.

MON COMMENTAIRE

J'AIME

L'Autorité des marchés financiers (AMF) est autrement plus vigilante que ne l'était l'ex-Commission des valeurs mobilières pour promouvoir les bonnes pratiques dans l'industrie financière. En 2011, l'AMF a sanctionné 1 201 personnes et imposé plus de 5,6 millions de dollars en amendes, pénalités et sanctions. Elle a déposé 1 999 chefs d'accusation, dont 1 990 pour des infractions à la Loi sur les valeurs mobilières du Québec.

Je n'aime pas

Selon des données préliminaires de Statistique Canada, les entreprises canadiennes non financières avaient à la fin de 2011 des avoirs liquides de 525 milliards de dollars, sans doute un sommet dans l'histoire du pays. C'est une hausse de 44 % depuis le début de 2009. Ce haut niveau de liquidités s'explique par la prudence de leurs dirigeants face à la conjoncture économique, mais il freine la croissance, puisque l'investissement des sociétés est une importante composante du produit intérieur brut. Cette passivité nuit aussi à la croissance de la productivité, étant donné que les entreprises ne profitent pas du taux de change avantageux de notre dollar pour investir dans de nouveaux équipements.

jean-paul.gagne@tc.tc

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