Ce que l'auto peut apporter à l'aérospatiale

Publié le 11/06/2011 à 00:00

Ce que l'auto peut apporter à l'aérospatiale

Publié le 11/06/2011 à 00:00

Depuis la fermeture de General Motors, à Boisbriand, l'industrie automobile a presque été rayée du paysage québécois. Mais ses méthodes de production continuent d'inspirer, en particulier dans l'aérospatiale, qui se prépare à assembler la CSeries de Bombardier.

Cet appareil de 110 à 149 places sera le premier de l'avionneur québécois à se mesurer à certains modèles de Boeing et d'Airbus. Et Bombardier, qui a une centaine de commandes dans son carnet actuellement, entend profiter de l'occasion pour se démarquer en intégrant à ses façons de faire les meilleures pratiques de production de l'industrie automobile.

" La tâche n'est pas facile. Ce n'est pas de la magie. Il y a beaucoup à faire avant de parvenir au niveau de l'industrie automobile. À ce chapitre, elle a 20 ans d'avance sur l'industrie aéronautique ", estime le vice-président de Bombardier à la production du CSeries, François Minville.

En raison d'un volume de production plus modeste que celui de l'automobile, la production des aéronefs a toujours été plus artisanale, plus statique et moins robotisée. Lors de visites d'usines d'assemblage, il est toujours surprenant de constater à quel point, malgré d'indéniables avancées technologiques, une grande partie des avions de Bombardier - comme ceux d'ailleurs de ses concurrents - sont encore fabriqués à la main.

D'autres grandes entreprises se sont déjà inspirées de l'industrie automobile pour leurs chaînes de montage. C'est le cas de Pratt & Whitney, à Longueuil, note Jacques Roy, professeur en gestion des opérations et de la logistique à HEC Montréal, qui détecte aussi une influence de l'industrie alimentaire, où fabricants et fournisseurs font un suivi en temps réel des besoins de production. Mais jamais au degré où Bombardier tente de le faire à sa nouvelle usine de Mirabel, résultat d'années de réflexion autour des principes bien connus de contrôle de qualité, de lean manufacturing et de la production juste-à-temps.

Un travail d'équipe

Cette façon de faire nécessite la collaboration active des 26 fournisseurs principaux sélectionnés par Bombardier, répartis dans 42 sites industriels différents. Par ricochet, elle touche aussi les dizaines de fournisseurs qui gravitent autour d'eux.

Parmi eux, on compte bien sûr l'américaine Pratt & Whitney, qui construit les moteurs, la montréalaise CAE, responsable des services de simulation, et une vingtaine d'autres fournisseurs canadiens de plus petite taille, dont Mecachrome de Mirabel, Elisen Technologies de Dorval, Marinvent Corporation, de Saint-Bruno, et Delastek, de Grand-Mère.

La nouvelle famille CSeries comptera également de nombreux fournisseurs européens, tels Alenia Aeronautica, responsable des dérives et stabilisateurs, Goodrich Actuation Systems, qui réalisera des systèmes de commande des volets, et la chinoise Shenyang Aircraft Corporation, chargée de la livraison du fuselage, la pièce maîtresse, littéralement le corps du CSeries.

De concert avec Bombardier, ces entreprises ont déterminé à l'aide de données historiques, les points les plus faibles de leur chaîne logistique de manière à éviter que l'assemblage du CSeries ne soit interrompu par des ruptures d'approvisionnement de composants ou de matières premières.

" Nous recherchons deux choses : la qualité des produits livrés et la livraison à temps. Notre objectif est d'éviter le plus possible les problèmes coûteux qu'ont connu ces derniers temps plusieurs usines du Japon à la suite du tremblement de terre ", dit M. Minville.

Bombardier a dû composer avec la résistance de certains fournisseurs, davantage pour des questions de respect de la qualité des produits que d'approvisionnement.

Tous n'apprécient pas qu'un donneur d'ordres comme Bombardier vienne imposer de nouvelles méthodes ou de nouveaux investissements pour une meilleure gestion des stocks, par exemple. Mais dans l'ensemble, explique M. Minville, la plupart des entreprises se sont pliées aux exigences de Bombardier.

Président et chef de la direction de Bombardier aéronautique depuis quelques années, Guy Hachey n'est pas étranger à cette évolution. Ancien patron chez GM, on lui reconnaît une influence déterminante dans les changements apportés aux activités de l'usine, à l'implantation d'une approche client et à une standardisation des façons de faire dans tous les sites de production de l'entreprise.

C'est grâce à lui notamment que Bombardier aura des chaînes de montage mobiles entièrement automatisées, tant dans son usine de l'arrondissement Saint-Laurent, à Montréal, qu'à sa nouvelle usine de Mirabel, toujours en construction.

D'une superficie de 80 000 pi2, le complexe de Mirabel comprendra, en plus de l'administration, des locaux pour les fournisseurs, des zones d'essai et d'assemblage, ainsi que des ateliers de peinture. Les composants assemblés et livrés à Bombardier en juste-à-temps se retrouveront ainsi éventuellement sur une chaîne de montage mobile qui avancera à une vitesse d'environ 30 cm à l'heure.

Sans être très rapide, ce mouvement suffira pour créer une petite révolution chez Bombardier, jusque-là surtout habituée à des environnements de production statiques, et à maintenir une " pression " dwwans le système pour le maintien de la cadence et de la qualité d'exécution des tâches.

C'est en raffinant le travail, explique M. Minville, en le standardisant au point de le rendre prévisible, qu'on arrive à assurer la qualité du produit final tout en réduisant la durée des cycles de fabrication.

DES ROBOTS ET DES STRATÉGIES

L'ajout de six robots de 10,89 tonnes métriques era également pour quelque chose dans l'automatisation de l'assemblage de la CSeries. En 32 secondes, chaque robot peut forer un trou et riveter ou enfoncer à coups de marteau une fixation dans le fuselage d'aluminium-lithium. Pour les sections de fuselage de matériaux composites, il lui faudra 53 secondes pour percer un trou, appliquer un scellant et mettre une fixation en place.

On estime aussi que quatre robots, dirigés chacun par un opérateur, pourront raccorder les différentes sections de fuselage d'un avion CSeries en seulement 17 heures. Au total, Bombardier estime que l'ajout de ces robots permettra de réduire de plus de 40 heures (ou une semaine) la durée du cycle nécessaire pour l'assemblage du CSeries.

Cette économie de temps et cette assurance de précision valent leur pesant d'or, en particulier alors qu'Airbus et Boeing continuent de faire l'objet de sarcasmes à propos des retards records qu'ils ont imposés aux clients de leurs plus récents appareils, le A380 et le Boeing 767.

" C'est clair qu'en plus d'une progression normale des façons de faire de l'industrie, cette orientation de Bombardier prend une allure stratégique lorsqu'on connaît les difficultés de ses concurrents à respecter leurs engagements ", dit Jacques Roy, de HEC Montréal.

D'ailleurs, fait-il remarquer, la direction de Bombardier ne manque pas une occasion de répéter que si le premier CSeries ne volera pas avant 2013, elle saura, elle, le livrer à temps...

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