Canarail joue gros en Mongolie et prend pied en Amérique latine

Publié le 19/01/2013 à 00:00

Canarail joue gros en Mongolie et prend pied en Amérique latine

Publié le 19/01/2013 à 00:00

Par Suzanne Dansereau

Canarail est l'une des entreprises québécoises qui ont le plus profité de la course aux métaux ces dernières années. Cette firme montréalaise d'ingénierie spécialisée dans le secteur ferroviaire est d'ailleurs l'une des rares à couvrir cette niche.

Canarail offre la gamme quasi complète de services, de l'étude de faisabilité à l'exploitation de chemin de fer. Le seul service qu'elle n'offre pas, c'est celui de la construction.

Espoirs en Asie

Fondée il y a 25 ans, à la suite de la privatisation du Canadien National et de la rationalisation du Canadien Pacifique par des cadres qui refusaient de prendre leur retraite, Canarail a attiré au départ des capitaux français qui voulaient se positionner pour un futur TGV canadien.Mais le projet n'a jamais abouti, et la société a orienté ses efforts vers le transport de marchandises à l'étranger (tout en remportant des contrats au Canada pour le transport de passagers).

Aujourd'hui, c'est en Asie que Canarail espère doubler son chiffre d'affaires d'ici cinq ans. L'an dernier, elle a remporté un contrat de supervision de travaux en Mongolie au sein d'un consortium international. La Mongolie est le pays qui a connu la plus forte croissance économique du monde en 2011 (17,5 %). Riche en minerais - notamment en charbon qui alimente les aciéries chinoises -, le pays n'a qu'un chemin de fer nord-sud le reliant à la Chine et à la Russie. Il faudra y ajouter près de 2 500 kilomètres d'est en ouest, avec des ramifications au sud-ouest où sont situées plusieurs mines.

«Quand je suis allé là-bas, j'ai fait «"Ouah, c'est le Klondike ici !"» raconte Miguel Valero, pdg de Canarail. Et c'est ainsi qu'il a ouvert un bureau à Oulan-Bator. «Le fait qu'on ne soit ni Chinois, ni Russe, ni Américain nous donne un avantage, ajoute- t-il. Et côté climat, la Mongolie ressemble au nord du Canada que nous connaissons bien.» (Canarail a réalisé l'étude de faisabilité et le design du futur chemin de fer du projet minier Mary River sur la Terre de Baffin.)

Partenariat en Colombie

Canarail amorce aussi une percée en Amérique latine. Voilà quelques jours, elle a annoncé la conclusion d'un partenariat avec la société de consultation et d'ingénierie ferroviaire A. de G. Ingenieria en Colombie. Le nouveau gouvernement prévoit près de 20 milliards de dollars américains en travaux d'infrastructure ferroviaire pour les prochaines années. Le financement viendra du privé, surtout du secteur minier, à qui le gouvernement offrira des concessions.

Ce partenariat est gagnant-gagnant aux yeux de M. Valero : «Les projets à venir sont trop gros pour A. de G. Ingenieria. Nous leur prêtons main-forte et ils nous fournissent la liste des clients.»

Canarail espère répéter l'expérience au Brésil, où 10 000 kilomètres de nouvelles voies ferrées sont à prévoir. L'entreprise se diversifie sur le plan géographique, comme elle l'a fait concernant les services.

Actuellement, Canarail rayonne dans 70 pays et oeuvre surtout dans l'industrie minière.

En Arabie saoudite, elle a obtenu la supervision de la construction d'un chemin de fer de 2 400 kilomètres entre Ryad et la Jordanie. Elle est aussi soumissionnaire d'un projet de chemin de fer reliant le nord de l'Afghanistan au Tadjikistan et à l'Ouzbékistan. Il y a quelques années, elle a ouvert un bureau au Cambodge, où elle aide à la réhabilitation du réseau ferroviaire au moyen de fonds institutionnels. En Afrique, elle réalise actuellement une étude de plus de quatre millions de dollars en Tanzanie pour relier le Burundi et le Rwanda au réseau ferroviaire tanzanien.

Sage diversification

Expert en ingénierie ferroviaire et consultant pour la Banque mondiale, Edmond Carpentier estime que Canarail est sur la bonne voie en envisageant son développement d'affaires en Asie et en Amérique latine. «Les grands bailleurs de fonds institutionnels, auparavant très actifs dans les infrastructures en Afrique, le sont moins actuellement. Ils comptent davantage sur le secteur privé pour financer ces projets, explique-t-il. Le monde ferroviaire a beaucoup changé, l'argent vient du privé.» C'est ce qui se passe en Colombie. L'Amérique latine a aussi l'avantage d'être plus facile à couvrir du Canada, et elle est plus solide sur les plans économique et politique, fait-il valoir.

CANARAIL EN BREF

Revenus de 15 à 30 M$

Nombre d'employés

Siège social montréalais 60

Ailleurs dans le monde (contractuels) 200

Présente sur cinq marchés (répartition géographique des revenus de Canarail)

Moyen-Orient 30 %

Afrique 25 %

Asie 20 %

Canada 20 %

Amérique latine 5 %

L'entreprise veut doubler la part de l'Amérique latine et de l'Asie dans son chiffre d'affaires.

L'entreprise tire la moitié de ses revenus du secteur minier (répartition sectorielle des revenus)

54 % Secteur des mines

36 % Secteurs institutionnel et public

10 % Ingénierie de matériel roulant

RISQUES ET DÉFIS MULTIPLES

LE RISQUE

L'instabilité

OEuvrant dans plusieurs pays, Canarail fait face à une multitude de risques, surtout sécuritaires et politiques. «Lors du printemps arabe, le gouvernement de l'un des pays touchés ne nous a pas payés - et ce n'est plus le même gouvernement aujourd'hui, explique M. Valero. Il faut avoir les reins solides» Le succès de Canarail dépend aussi de la solidité de l'industrie minière. Cela n'inquiète pas trop M. Valero. «Si la planète bascule en récession, nous offrirons des services d'optimisation plutôt que de développement.»

LE DÉFI

Recruter des employés qualifiés

Il y en a peu. Canarail s'appuie toutefois sur un réseau de retraités prêts à réaliser de courts mandats d'assistance à l'étranger. Canarail profite aussi de la crise européenne qui lui envoie des candidats compétents. Elle investit 3 % de sa masse salariale en formation. Autre option : elle s'associe avec d'autres firmes de génie, pas nécessairement spécialisées en génie ferroviaire.

LE CONSEIL

Soigner sa réputation

«Le monde ferroviaire est un petit monde. Il ne faut pas sous-estimer l'importance de sa réputation et de son réseau», indique M. Valero. Lors d'un contrat, un problème est survenu et ce n'était pas la faute de Canarail, poursuit-il. Plutôt que de laisser le client en plan, nous avons mis en place une équipe pour régler son problème. Cela nous a coûté 300 000 $, mais c'était la bonne chose à faire, car notre réputation d'être fiables et compétents, nous voulons la conserver.»

19 G$

Montant des dépenses à faire dans les infrastructures ferroviaires en Colombie au cours des prochaines années, selon le gouvernement colombien

suzanne.dansereau@tc.tc

Dans cette série, nous décodons la stratégie internationale d'une entreprise canadienne et analysons ses risques.

Sur le Web, Les Affaires s'associe à L'actualité, Canadian Business, The Report on Business, The Economist Intelligence Unit et à la banque HSBC pour offrir un site axé sur les exportations. À lire sur affairessansfrontieres.ca.

@la_monde @suzdansereau

LinkedIn : ow.ly/bc0cw

À la une

Bourse: records en clôture pour Nasdaq et S&P 500, Nvidia première capitalisation mondiale

Mis à jour le 18/06/2024 | lesaffaires.com, AFP et Presse canadienne

REVUE DES MARCHÉS. Les titres de l’énergie contribuent à faire grimper le TSX.

Stellantis rappelle près de 1,2 million de véhicules aux États-Unis et au Canada

Environ 126 500 véhicules au Canada sont concernés par le rappel.

Le régulateur bancaire fédéral maintient la réserve de stabilité intérieure à 3,5%

L’endettement des ménages reste une préoccupation pour le Bureau du surintendant des institutions financières.