Alain Bouchard, le stratège

Publié le 22/12/2012 à 00:00, mis à jour le 20/12/2012 à 10:15

Alain Bouchard, le stratège

Publié le 22/12/2012 à 00:00, mis à jour le 20/12/2012 à 10:15

Alain Bouchard est la personnalité d'affaires qui a le plus marqué 2012, selon un sondage réalisé par Léger Marketing auprès de la communauté d'affaires. C'est l'occasion de faire le point sur l'homme et son entreprise. On croyait bien connaître l'histoire de Couche-Tard. Erreur ! Le pdg y va de plusieurs révélations : les tentatives d'achat en Asie et en Amérique du Sud, l'offre concernant Valero, le plan de relève, etc. Compte-rendu.

La Chine dit non, la Scandinavie dit oui

Comment Couche-Tard s'est-elle retrouvée en Scandinavie ? Grâce à l'Asie, qui deux fois lui a dit non, et à l'Amérique du Sud, dont les grandes familles du pétrole préféraient continuer à mener leurs propres barques.

Avant de prendre position en Norvège, au Danemark, en Suède et dans les pays baltes, avec l'acquisition de Statoil Fuel & Retail, Couche-Tard tente à quelques reprises de s'étendre sur d'autres continents.

L'entreprise essaie d'abord de percer le marché asiatique, avec un projet d'acquisition et d'implantation en Indonésie. Un partenaire est dans le décor, mais le gouvernement du pays s'arrange pour faire avorter l'affaire. «Ils trouvaient qu'un gros joueur nord-américain représentait un risque pour les petits», dit le pdg Alain Bouchard.

Couche-Tard se tourne alors vers la Chine, qu'elle espère percer à l'aide de sa filiale Circle K Asia. Les choses devraient cette fois être plus faciles, puisque Circle est déjà installée à Hong Kong, un territoire chinois, mais les Chinois font aussi en sorte de bloquer le projet.

«Ils se sont mis à changer la réglementation des produits. Par exemple, nous n'aurions pas eu le droit de vendre de cigarettes chinoises. Or, les cigarettes chinoises, tu en as besoin si tu veux vendre aux Chinois, et c'est une bonne partie du chiffre d'affaires d'un dépanneur», se remémore-t-il. Au pays de Mao aussi, soupçonne Alain Bouchard, les autorités veulent protéger les plus petits commerces.

Face aux difficultés, la chaîne de dépanneurs jette plutôt un coup d'oeil du côté de l'Amérique du Sud. Des approches ont notamment lieu au Mexique, en Argentine, au Brésil et au Chili. Les réseaux de grandes pétrolières sont dans la ligne de mire à chaque endroit. Mais ils sont la propriété de grandes familles. «On leur a parlé par l'intermédiaire de banques d'affaires, on a compris qu'elles étaient réceptives à nos idées, mais qu'elles pensaient sans doute pouvoir se passer de nous.»

Après cette série d'insuccès, en 2007, Couche-Tard décide donc qu'elle concentrera son expansion sur les pays développés où les règles de droit sont plus clairement énoncées.

L'acquisition de Statoil & Fuel Retail

Deux ans plus tard, en 2009, le grand patron de Couche-Tard entend entre les branches que le géant pétrolier scandinave Statoil cherche à créer de la valeur en essaimant ses activités de distribution.

«J'ai appelé le président et lui ai offert de le rencontrer en lui disant qu'ils n'auraient pas nécessairement besoin de faire un spin-off [un essaimage]. Il m'a demandé de lui écrire pour lui donner des renseignements plus détaillés sur nos intentions. Ce que j'ai fait. Ils ont préféré aller de l'avant avec le spin-off, mais en disant "on ne sait jamais".»

L'affaire en reste là. Statoil essaime ses activités de distribution qui deviennent Statoil Fuel & Retail, une chaîne de 2 300 établissements que la société mère contrôle à 54 %.

Pendant ce temps, Couche-Tard se met à magasiner ailleurs en Scandinavie. À la fin de 2011, Alain Bouchard est justement là-bas pour tenter de mettre la main sur un réseau de 300 dépanneurs. Le hasard l'amène dans un Statoil. «Je me suis dit, peut-être que je pourrais le rappeler.»

L'appel est passé et, en février, Couche-Tard, qui cherchait à acquérir 300 dépanneurs, en achète plutôt 2 300. La plus grosse transaction de son histoire.

ALAIN BOUCHARD EN RAFALE

Les personnes qui vous ont inspiré

En dehors de mes partenaires Réal Plourde et Richard Fortin, il y a notamment eu Antoine Turmel et Dick Curry. Antoine Turmel a construit Provigo, il était créatif et voulait bâtir. Dick Curry était le grand patron de Loblaw, et c'est lui qui l'a fait grandir. J'ai assisté une fois à un match de hockey en compagnie de Dick Curry dans une loge au Centre Bell. Ni lui ni moi n'avons vu la partie !

Un conseil à un jeune entrepreneur

Ne pas trop écouter les conseils, justement, et foncer. Il y aura toujours des gens pour vous dire que ce n'est pas le bon moment.

Les syndicats

Cette question a déjà fait trop de bruit. Je préfère ne pas revenir là-dessus.

La législation québécoise sur la langue française

La législation sur le français est tout à fait appropriée, et j'ai de la difficulté à comprendre comment toute cette histoire a pu prendre une telle ampleur. C'est tout simplement con. À croire que la Caisse de dépôt ne pourrait plus nous financer. Des fonctionnaires et des journalistes ont fait du zèle. J'imagine qu'on était en retard, je n'avais pas porté attention à cela.

Le projet du ministre des Finances du Québec de permettre au conseil d'administration de rejeter une offre d'achat étrangère

Je pense qu'en fin de compte la décision de vendre appartient aux propriétaires, et les propriétaires, ce sont les actionnaires. Il faut faire attention avant de les empêcher d'exercer leur droit. Cela dit, donner plus de pouvoirs aux conseils d'administration en cas d'OPA n'est pas non plus dénué de sens. Le conseil de Caseys [aux États-Unis], qu'on a essayé d'acheter, avait plus de latitude, et ça l'a aidé.

Advenant une OPA sur Couche-Tard...

Je ne serais pas vendeur. Je suis un actionnaire comme les autres, mais je pense que cette compagnie a encore beaucoup de potentiel.

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