Starfrit, Krazy Glue, Hertel, le tapis Sauve-pantalon, le balai Oskar, la vadrouille Abeille, Crazy Carpet, le balai à feuilles T-Rex, la poêle T-fal, l'engrais Vita Grow... Il faudrait que vous ayez vécu sur une autre planète au cours des 30 dernières années pour ne pas connaître au moins quelques-uns de ces noms !
Tous ces articles ont connu un fort succès au Québec grâce à Jacques Gatien, président des Promotions Atlantiques. À 71 ans, ce bâtisseur de marques populaires se lance maintenant dans un nouveau défi : relever l'image de sa marque principale, Starfrit, qui a vendu 101 millions d'articles depuis 25 ans.
M. Gatien a déjà commencé à commercialiser des produits plus haut de gamme et compte vendre de petits appareils électriques pour la maison d'ici deux ans.
" Faire de la publicité pour vendre des articles de 6 $ ou 7 $, ce n'est plus rentable ", dit M. Gatien, qui souhaite à l'avenir orienter sa commercialisation vers des articles qui se vendent entre 25 et 40 $.
Par exemple, sa nouvelle balance, qui calcule sept valeurs nutritives comme le gras, les protéines et les fibres contenus dans une pièce de viande crue. Un appareil dont le prix suggéré est de 39,95 $. Ou ses nouveaux articles de cuisine - entonnoir, passoire, égouttoir - qui se plient pour un rangement plus facile. Et une nouvelle version, en verre, des contenants hermétiques Lock & Lock.
" Il aurait pu lancer une nouvelle marque plus haut de gamme mais il a choisi de rehausser la marque Starfrit. Selon moi, il a fait le bon choix, dit Renaud Legoux, professeur adjoint en marketing à HEC Montréal. Lancer une nouvelle marque aurait été coûteux et cela aurait pris du temps à donner des résultats ", ajoute-t-il.
Jasmin Bergeron, professeur de marketing à l'École des sciences de la gestion de l'Université du Québec à Montréal, est d'accord : " La marque Starfrit est associée à des produits économiques, mais qui fonctionnent. Relever graduellement l'image de Starfrit est réalisable, et même souhaitable. "
À l'assaut des boutiques spécialisées
Les ventes de la marque Starfrit ont augmenté de 25 % en un an, grâce au lancement de ces nouveaux produits et à la percée du marché américain, entreprise il y a trois ans. M. Gatien espère maintenir ce rythme de croissance pendant quelques années.
" Nous voulons pénétrer le marché des boutiques spécialisées, et elles ne veulent pas des mêmes articles que Walmart, Zellers ou Canadian Tire, explique M. Gatien. Les grands magasins se contentent d'une marge bénéficiaire d'environ 30 %, alors que les boutiques visent une marge de 50 %. Or, il est presque impossible de prendre une marge de 50 % sur un produit vendu 5 ou 6 $. "
Ces articles plus milieu de gamme représentent une étape intermédiaire d'ici le lancement, dans deux ans au plus tard, de petits appareils électriques à 50 $ ou moins, comme un malaxeur, un grille-pain, un hachoir, etc. " Nous arriverons dans ce marché avec 10 ou 12 nouveaux produits. "
" Jacques Gatien a une stratégie de marques très intéressante pour gérer les conflits entre les différents réseaux de distribution ", soutient M. Legoux.
Plus question de ne pas contrôler ses marques
En 1992, les Promotions Atlantiques ont perdu le contrat de distribution d'un produit vedette, la colle Krazy Glue. Quatre ans plus tard, une autre tuile tombe sur la tête du propriétaire, Jacques Gatien, lorsque le fabricant français de la poêle T-fal rompt leur entente après 30 ans.
Trente ans à bâtir une marque; deux millions d'unités vendues chaque année, pour des ventes de 25 millions de dollars. La perte du contrat fait mal, mais la leçon porte; M. Gatien jure qu'on ne l'y reprendra plus, à investir dans des marques qu'il ne contrôle pas. C'est le début du grand ménage : Vileda, Oskar, Hertel et autres, il vend tout pour se recentrer sur Starfrit. Il n'a conservé que les balais à feuilles T-Rex parce qu'il n'a pas reçu d'offre d'achat satisfaisante. La seule marque que Promotions Atlantiques ne contrôle pas totalement encore est Lock & Lock, des contenants hermétiques.
Starfrit, qui fête cette année son 25e anniversaire, devient son cheval de bataille et en réponse à T-fal, il lance deux gammes de poêles en fonte d'aluminium, Starfrit (vendues principalement chez Walmart) et Héritage (vendues surtout chez Sears et Canadian Tire). " Autrefois, il y avait plusieurs petits magasins indépendants. Aujourd'hui, le marché est monopolisé par quelques géants qui ne veulent pas vendre les mêmes marques que leurs rivaux ", explique M. Gatien, qui travaille aux côtés de ses trois enfants, Angélique, Éric et Jacques.
Les articles de fonte d'aluminium comptent aujourd'hui pour 10 des 70 millions de dollars de ventes annuelles de Promotions Atlantiques. Entre 15 et 20 millions de dollars de ventes sont réalisées aux États-Unis. L'entreprise distribue plus de 1 000 articles, souvent achetés à des inventeurs auxquels elle verse des redevances de 4 à 6 % des ventes.
