Le grand patron de Couche-Tard, Alain Bouchard, soutient qu’il est « sensible » à son image. Mais il s’est emporté au point de quitter précipitamment la salle où se tenait une rencontre avec les médias lorsqu’il a été question de syndicalisation.
Alain Bouchard a raconté qu’il mettait fin à une « sabbatique de conférences de quatre ou cinq ans » en venant s’adresser à l’Association des MBA du Québec, dans un hôtel du centre-ville de Montréal ce midi.
Cette rare sortie du dirigeant n’a pas manqué d’attirer la CSN, qui en a profité pour faire entendre son message sur le boulevard René-Lévesque. « Alain Bouchard, la richesse, ça se partage. Fais donc preuve de souplesse à la table de négociations », a clamé Diane David, secrétaire générale de la Fédération du commerce-CSN.
La bruyante foule de près de 200 personnes, composée de syndiqués, de lock-outés d’Olymel et d’employés de Couche-Tard était munie de sifflets, de flûtes, de drapeaux et de pancartes. « Bouchard, fais pas le smatt. Attention on va se battre », scandait la foule entre deux discours.
Pendant ce temps, les avocats de Couche-Tard réclamaient devant la Commission des relations de travail (CRT) que le contenu des témoignages soit frappés d’une ordonnance de non-publication.
Après son allocution d’une vingtaine de minutes, Alain Bouchard a accepté de rencontrer les médias à certaines conditions. « On ne pourra pas faire de commentaires, je ne prendrai pas de questions concernant les syndicats. On est présentement au tribunal, il y a des causes pendantes. En plus, nous sommes en négociations avec le syndicat de l’un de nos magasins. Alors pas de questions là-dessus, pas de réponse », a-t-il dit, sous le regard de ses gardes du corps et de son relationniste.
« De la provocation inutile »
Mais surprise, quelques minutes plus tard, le dirigeant a commenté l’ouverture controversée du dépanneur Provi-Soir sur la rue Saint-Denis en réponse à une question sur cette enseigne (propriété de Couche-Tard) qui prend soudainement du gallon. Le commerce qui sera opéré par un affilié a récemment fait parler de lui parce qu’il est situé à 500 mètres du Couche-Tard fermé peu de temps après la syndicalisation de ses employés (au coin des rues Saint-Denis et Beaubien).
« Honnêtement, si j’avais été informé de celui-là qui a fait les manchettes, je ne l’aurais pas ouvert. Je l’ai appris par les journaux, ce n’était pas une bonne idée », a confié Alain Bouchard.
—Vous l’auriez retardé ?
« On se serait retiré, c’est de la provocation inutile »
—Vous parlez bien de celui sur Saint-Denis près de Beaubien ?
« On parle d’autre chose »
Questionné au sujet de son image, Alain Bouchard s’est enflammé. « Bien sûr que je suis très sensible [à mon image]. Voyons donc ! J’ai fondé cette compagnie là il y a plus de 30 ans et j’en suis très fier. On a des employés extraordinaires. D’ailleurs vous devriez aller les questionner », a-t-il lancé aux journalistes, les accusant au passage de manquer d’éthique dans leur couverture des événements.
Après avoir refusé de répondre à trois autres questions et visiblement contrarié, le dirigeant a soudainement quitté la salle à la surprise générale.
« On ne connaissait pas encore les avocats »
Au cours de sa présentation intitulée « La petite histoire des grandes acquisitions », Alain Bouchard semblait pourtant détendu. Parfois avec un brin d’humour, il a raconté de quelle manière il a acheté les dépanneurs 7 Jours, La Maisonnée, Mac,s, Perrette et Provi-Soir au fil des ans.
En parlant de l’acquisition de la marque Couche-Tard et des 11 dépanneurs portant ce nom, en 1985, il a précisé que tout avait été négocié par des comptables. « On ne connaissait pas encore les avocats, mais on a fini par les rencontrer ! »
Lorsque deux femmes représentant la CSN se sont rendues près de la scène avec une banderole réclamant de meilleures conditions de travail pour les employés de Couche-Tard, il est resté calme et a commenté la qualité du dessin de hibou. « Il n’est pas très ressemblant, je trouve ».
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