Tous les investisseurs d’un certain âge se souviennent sans doute du Régime d’épargne--actions du Québec, appelé communément le RÉA. Ce programme a permis à des dizaines de sociétés québécoises de lever des milliards de dollars de financement en capital-actions et de grandir. Des noms : CGI, Cascades, Alimentation Couche-Tard, Metro, Saputo, SNC-Lavalin, Genivar (devenue WSP), Jean-Coutu, Transcontinental, Canam, Transat A.T., Gildan, Héroux--Devtek, Cogeco, Lassonde et des dizaines d’autres. Il a aussi aidé des dizaines de milliers de Québécois à s’initier à l’investissement en Bourse. Il faut dire merci à Jacques Parizeau de l’avoir créé.
Par contre, à moins d’avoir lu notre manchette sur le défi des PAPEs au Québec (http://bit.ly/1vLn0nn), à peu près personne ne sait qu’il existe toujours un programme RÉA, appelé RÉA II par les initiés. La cause de cette méconnaissance : ce programme est très très peu utilisé, parce qu’il a été mal conçu. Pire, il est à l’article de la mort, sa date de péremption ayant été fixée au 31 décembre 2014. Plusieurs facteurs ont causé cette situation :
> Le programme RÉA a fait l’objet d’un moratoire de 2003 à 2005. Après l’échec du programme accro-PME, lancé en 2005 pour le remplacer, Québec a créé le RÉA II en 2009, assorti d’une déduction de 150 % du montant investi, déduction qui fut ramenée à 100 % en 2011. Résultat de ce cafouillage : il ne s’est émis que pour 20 millions de dollars d’actions RÉA par année depuis cinq ans, représentant un coût fiscal annuel insignifiant de 5 M$ ;
> Les courtiers en valeurs mobilières ne s’intéressent qu’aux émissions d’une certaine taille. Les premiers financements RÉA avaient été réalisés par des courtiers de petite et de moyenne taille, comme McNeil Mantha, Geoffrion Leclerc et Tassé. Or, la presque totalité des courtiers qui avaient pignon sur rue au Québec ont été achetés par les banques ; contrairement à d’autres provinces, le Québec n’a presque plus de courtiers boutiques ;
> La faiblesse des taux d’intérêt facilite les financements des entreprises par la dette ;
> Le capital de risque abonde au Québec ; en plus des fonds qui procurent un avantage fiscal (Fonds FTQ, Fondaction, Capital régional et coopératif Desjardins), plusieurs fonds spécialisés, dont certains sont étrangers, offrent du financement sous forme de capital-actions ;
> La Bourse de Montréal, qui inscrivait à sa cote toutes les actions financées dans le cadre du RÉA, a été achetée par la Bourse de Toronto, à laquelle ses activités de marché sur les actions ont été intégrées. La Bourse de Montréal jouait un rôle dans la liquidité et la visibilité des actions des sociétés québécoises.
Tous ces facteurs ont affaibli l’écosystème de financement des entreprises par l’émission publique d’actions.
Un contexte défavorable aux entreprises québécoises
Il en résulte un moins grand accès au financement public et un contexte moins favorable au développement de grandes sociétés québécoises qui ont leur siège social au Québec : cela veut aussi dire moins d’emplois de qualité et moins de retombées économiques dans l’industrie des services : audit comptable, conseil juridique et fiscal, assurance, analyse financière, etc.
Le Québec ne compterait plus que 7 % des sociétés inscrites à la Bourse de Toronto et à la Bourse de croissance TSX (petites capitalisations). En 2013, seulement 5,3 % des nouvelles sociétés inscrites à la cote de ces Bourses venaient du Québec. Il faudrait être borné économiquement pour se satisfaire de cela et laisser Toronto, Vancouver et Calgary accroître leur part des sièges sociaux de sociétés canadiennes.
Mesures de relance du RÉA
Il est certain que le RÉA n’aura plus jamais l’impact qu’il a eu dans les années 1980. Cela ne veut pas dire que l’on doive se résigner à perdre cet outil de financement des PME. L’émission publique d’actions permet aussi à une société de profiter des cycles boursiers.
Voici plusieurs mesures parmi lesquelles le gouvernement du Québec pourrait puiser pour relancer le programme RÉA :
> Porter de 200 M$ à au moins 500 M$ le plafond du capital des sociétés admissibles au RÉA ;
> Alléger l’obligation de détenir les titres pendant trois 31 décembre d’affilée pour conserver l’avantage fiscal du programme ;
> Accroître le taux de la déduction fiscale au moins pour les petites sociétés des secteurs à haut risque (santé et hautes technologies) ;
> Rendre admissibles les sociétés non québécoises si la majorité de leurs emplois ou de leurs immobilisations se trouvent au Québec ;
> Rendre admissibles les sociétés québécoises dont la majorité des emplois sont à l’extérieur ;
> Rendre admissibles au REER ou au CELI les titres RÉA ;
> Encourager le développement au Québec de courtiers boutiques spécialisés dans le financement par actions de PME.
Preuve du manque de vision des apprentis sorciers qui se sont amusés à défier les marchés, le RÉA II relève de Revenu Québec. Pourrait-on considérer le RÉA comme un outil de financement au lieu de le voir comme une dépense fiscale à contrôler ?
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