Le dollar canadien a continué de décliner lundi pour repasser sous la parité avec sa contrepartie américaine pour la première fois depuis août, plombé par un recul du prix du pétrole et les récentes données économiques négatives pour le Canada.*
Selon Bloomberg, le huard baisse pour une cinquième séance consécutive, s’établissant à 99,95 cents US, en repli de 0,04%. Il s’agit de la plus longue séquence baissière pour le huard depuis mai.
Le dollar canadien a clôturé à parité avec la devise américaine pour la dernière fois le 6 août dernier.
Plusieurs éléments négatifs survenus récemment jouent contre la devise canadienne.
Depuis le 13 septembre, jour où la Banque centrale américaine a annoncé une nouvelle intervention pour stimuler l’économie, le huard est la devise la plus faible parmi les principales monnaies, souligne dans son bulletin quotidien Camilla Sutton, stratège en chef du marché des devises pour la Banque Scotia.
«Plusieurs facteurs qui ont soulevé le huard sont devenus défavorables», note-t-elle. La stratège énumère le recul du prix du pétrole, l’écart de taux entre les obligations canadiennes et américaines de deux ans et les statistiques économiques canadiennes plus faibles, dont celles sur l’immobilier et l’inflation.
François Barrière, vice-président développement à la Banque Laurentienne et spécialiste des devises, observe que le prix du baril de pétrole a rapidement chuté d'un pic de plus de 100$ US le baril à moins de 85,50$ US aujourd'hui.
Mais par dessus tout, il estime que la devise canadienne est surévaluée de 10 à 15 % selon différentes mesures de parité du pouvoir d'achat. «Je pense que le dollar canadien devrait baisser de 5 à 10 % dans les prochains mois pour refléter sa juste valeur. Est-ce que ça se passera cette fois-ci?» dit M. Barrière, soulignant que la tendance économique des derniers mois était plus favorable aux États-Unis qu'au Canada.
L'expert rappelle qu'à l'instar des actions de petite capitalisation, le dollar canadien est une monnaie peu pesante dans le marché international des devises. «Les investisseurs accumulent des dollars canadiens de façon graduelle, mais quand ils décident de prendre des profits, la devise peut se déprécier très rapidement.»
Inquiétudes envers la solidité de l'économie canadienne
En rien pour aider la cause de la monnaie canadienne, l’agence de notation Moody’s a placé vendredi les institutions financières du pays sous surveillance en vue d’une éventuelle décote de leurs dettes à long terme.
Moody’s dit avoir des «préoccupations quant aux niveaux élevés d’endettement des consommateurs et aux prix élevés de l’immobilier, aux risques macroéconomiques, au comportement du marché boursier et à des enjeux directement liés aux banques».
L'appétit des cambistes pour la devise canadienne pourrait aussi avoir souffert des propos tenus par Mark Carney, grand patron de la Banque du Canada, qui juge moins urgent d'augmenter les taux d'intérêt compte tenu du contexte économique mondial et de l'endettement élevé des canadiens.
Par ailleurs, la décision d'Ottawa de bloquer l'acquisition de la pétrolière canadienne Progress Energy par le géant malaisien Petronas a aussi contribué à affaiblir le huard.
Les données sur le marché de l'emploi au Canada et aux États-Unis, qui seront publiées vendredi, devraient déterminer l'évolution du huard dans les jours suivants.
*Le texte a été mis à jour vers 14h50 pour inclure les commentaires de François Barrière.